31.01.2016
DÉSINVOLTURE ET LAXISME : CHIRAC
On lit une plaisante histoire dans le Figaro du 29 janvier 2016, rapportée par Anne Fulda dans sa chronique de la semaine, « Du silence de Najat aux statues couvertes de Rome, l'identité malheureuse ».
Mardi 26 janvier. […] Amusante anecdote de Raymond Soubie, rencontré à un dîner. Alors qu'en marge de la sortie du documentaire Salafistes, certains réclament que le film soit interdit aux moins de 18 ans, il se souvient qu'à l'époque de la sortie de L'Empire des Sens[1] en France, il travaillait aux Affaires culturelles, au côté de Jacques Chirac, alors premier ministre[2]. À l'époque le film, qui avait fait scandale lors de sa sortie au Japon et avait été taxé de pornographique, est menacé de ne pas sortir en France. Jacques Chirac dit alors à son conseiller : « On n'a qu'à se faire projeter le film cet après-midi. » Les voici dans la salle de projection. Commence le film. Cinq minutes après le début, Jacques Chirac s'endort profondément. Il ne se réveille qu'à la musique du générique de fin et lance alors à son conseiller : « Franchement, il n'y avait pas de quoi fouetter un chat ». Et c'est ainsi que le film a été autorisé en France.[3]
Désinvolture, incompétence, irresponsabilité, et pour finir laxisme : c’est tout Chirac. Même sur un sujet qui aurait dû l’intéresser, puisqu’on sait qu’il nourrit depuis sa jeunesse une passion pour le Japon, pays où il s’est rendu une cinquantaine de fois dans sa vie (!), il décide sans avoir pris la mesure de ce sur quoi il décide. Et il décide dans le sens de la permissivité. On trouverait facilement des dizaines d'anecdotes dans le même esprit : il suffit de se plonger dans les archives de la presse ou les livres des témoins pour en ramasser par brassées entières. Il convient de s’en souvenir alors que, par rejet de Sarkozy et d’Hollande, de plus en plus d’esprits oublieux tendent, par opposition, à lui décerner le brevet d’Homme d’État.
[1] Film de 1976, réalisé par Nagisa Oshima. Ce film à la Georges Bataille contient en effet des scènes pornographiques et, à la fin, une pénible scène d’émasculation. Le titre français serait une allusion à L’Empire des signes, le livre de Roland Barthes sur le Japon ; le titre original se traduirait par La Corrida de l’amour, ce qui correspond bien mieux au contenu.
[2] En fait, Raymond Soubie a été conseiller social à Matignon de 1974 à 1981, sous Jacques Chirac puis Raymond Barre. Il a repris la même fonction à l’Élysée entre 2007 et 2010, auprès de Nicolas Sarkozy.
[3] En fait, il n’était pas question d’une censure intégrale, mais du classement du film dans la catégorie des films pornographiques. Au Japon il fit l’objet d’une censure partielle : scènes coupées, floutage des organes sexuels. En France il a seulement été interdit aux moins de seize ans.
13:19 Écrit par Le déclinologue dans Chronique politique, Littérature et arts, Problématiques sexuelles, Tableau d'infamie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chirac, raymond soubie, l'empire des sens, nagisa oshima, georges bataille, anne fulda, films pornographiques, la corrida de l'amour, roland barthes, l'empire des signes, japon, désinvolture, censure, salafistes | | | Facebook | | Imprimer | | Digg |