ROMANCIERS FRANÇAIS 1848-1914 : SÉLECTION D’APHORISMES
14.04.2017
J’ai entrepris de rassembler les meilleurs aphorismes des romanciers français du XXe siècle. Mais j’aboutissais à une page tellement pléthorique que je l’ai scindée en quatre parties. Voici la première, qui couvre toute la seconde partie du long XIXe siècle allant jusqu’à 1914. De la sorte, cette page prend la suite directe de la page [en préparation] des auteurs romantiques français, même si, à vrai dire, le fleuve de la littérature française, au milieu du XIXe, se scinde sur ce blogue en trois tronçons de genre, puisque je prépare une page dévolue aux dramaturges et une autre aux poètes. Le cours le plus important, celui des romanciers, commence ici, et se poursuivra par trois autres biefs : celui des romanciers de la première moitié du XXe siècle (nés entre 1870 et 1906), celui des romanciers de la seconde moitié du XXe siècle (nés entre 1907 et 1940) et celui des romanciers contemporains (nés depuis 1941).
Comme dans les autres pages de la série, les auteurs sont ici classés par ordre chronologique rigoureux de date de naissance. Voici des liens internes pour accéder directement aux principaux contributeurs : ALAIN-FOURNIER (4) ; René BOYLESVE (4) ; Alphonse DAUDET (8) ; ERCKMANN-CHATRIAN (5) ; Abel HERMANT (2) ; Joris-Karl HUYSMANS (34) ; Maurice LEBLANC (14) ; Gaston LEROUX (20) ; Jean LORRAIN (4) ; Pierre LOTI (4) ; Pierre LOUŸS (6) ; Camille MAUCLAIR (4) ; Joséphin PÉLADAN (7) ; Louis PERGAUD (7) ; Ernest PSICHARI (6) ; Hugues REBELL (30) ; Romain ROLLAND (22) ; J.H. ROSNY AÎNÉ (0) ; Marcel SCHWOB (8) ; Victor SEGALEN (18) ; Jules VERNE (4).
J’ai conscience que ces quatre pages de romanciers français sont un peu fourre-tout, parce que plusieurs écrivains ici présents ne sont pas seulement romanciers, mais aussi dramaturges, poètes, essayistes, autobiographes, etc. Il m’a semblé néanmoins qu’ils étaient principalement romanciers, même si on pourrait discuter quelques cas. Qu’on veuille bien considérer que leur placement ici a une fonction avant tout pratique, et n’implique pas une évaluation de leur œuvre. Qu’on ne s’étonne même pas si certains ne sont présents que pour des aphorismes tirés d’œuvres non romanesques : c’est que le roman n’est pas le genre le plus propice à la production de sentences qui font penser ! Enfin, d’autres écrivains, que j’aurais pu mettre ici, sont placés dans les deux pages [à paraître] des auteurs de droite et des auteurs de gauche, parce qu’il m’a semblé que leur image politique (qui n’est pas forcément la couleur propre de leur œuvre) l’emportait sur leur image de romancier ; ou alors parce que leurs romans sont chiches d’aphorismes et que j’ai surtout puisé des pensées dans leurs essais polémiques. Là encore, j’ai bien conscience que cette répartition est très arbitraire [1]. Tant pis !
Ces pages collectives sont bien entendu destinées à s’enrichir au fil des années à venir, plus encore que les pages individuelles dévolues à un seul auteur : je les publie quand elles me paraissent avoir atteint un volume satisfaisant, certainement pas quand je les crois achevées.
VICTOR HUGO (1802-1885) : [page spéciale en préparation]
ALEXANDRE DUMAS (1802-1870) : Voir page spéciale
JULES BARBEY d’AUREVILLY (1808-1889) : [page spéciale en préparation]
THÉOPHILE GAUTIER (1811-1872) : Voir page spéciale
ARTHUR de GOBINEAU (1816-1882) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de droite]
PAUL FÉVAL (1816-1887) : [voir page en préparation dévolue aux auteurs romantiques français]
GUSTAVE FLAUBERT (1821-1880) : [page spéciale en préparation]
EDMOND de GONCOURT (1822-1896) et JULES de GONCOURT (1830-1870) : [page spéciale en préparation]
ÉMILE ERCKMANN (1822-1899) et ALEXANDRE CHATRIAN (1826-1890)
. Oui, c'est de l'habitude que vient presque tout, car bien peu d'hommes ont le courage et la persévérance nécessaires pour changer leurs mauvaises habitudes, lorsqu'ils s'en aperçoivent. […] La grande masse suit ses habitudes comme un troupeau, et c’est pour celà que l’éducation fait non seulement les individus, mais les nations tout entières. (Erckmann-Chatrian, Histoire d'un sous-maître, « Histoire d’un sous-maître », II, Hetzel, 1871, p. 32-33).
. Il faut avoir du bon sens pour reconnaître son ignorance et vouloir s’en corriger […] ; celà montre un jugement sain en même temps que du caractère. Combien d’imbéciles se croient des aigles, et vont jusqu’à faire la leçon à des gens mille fois plus instruits qu’eux ! (Erckmann-Chatrian, Histoire d'un sous-maître, « Histoire d’un sous-maître », IV, Hetzel, 1871, p. 81-82).
. Instruire le peuple, lui raconter l’histoire de ses anciens, c’est fonder la Démocratie sur le roc de la Nation. Hors de là point de salut ! (Erckmann-Chatrian, Histoire d'un sous-maître, « Le bon vieux temps », II, Hetzel, 1871, p. 275).
. Le fanatisme religieux rend les hommes pires que les derniers des animaux. (Erckmann-Chatrian, Une campagne en Kabylie et autres récits, « Une campagne en Kabylie. Récit d’un chasseur d’Afrique », Hetzel, 1873, p. 115-116).
. Poirier : « Mauvais émigré !… Ça s’est battu vingt ans contre le pays, et ça insulte les patriotes ! » (Erckmann-Chatrian, Contes vosgiens (1877), « Le vieux tailleur », Hetzel, 1878, p. 68).
ALEXANDRE DUMAS FILS (1824-1895) : [voir page en préparation dévolue aux dramaturges français XIXe-XXe siècles]
. L’amitié ne saurait exister entre deux êtres parfaitement identiques. (Jules Verne, Cinq Semaines en ballon (1863), III ; G.F. n°323, 1979, p. 55).
. Nemo : « On ne saurait empêcher l’équilibre de produire ses effets. On peut braver les lois humaines, mais non résister aux lois naturelles. » (Jules Verne, Vingt mille lieues sous les mers (1870), II, xv ; Pléiade Voyages extraordinaires 1, 2012, p. 1149).
. Nemo : « J'ai fait partout le bien que j'ai pu, et aussi le mal que j'ai dû. Toute justice n'est pas dans le pardon ! » (Jules Verne, L’Île mystérieuse (1875), III, xvi ; Pléiade Voyages extraordinaires 2, 2012, p. 664).
. La civilisation est comme l'air ou l'eau. Partout où un passage – ne fût-ce qu'une fissure – lui est ouvert, elle pénètre et modifie les conditions d'un pays. (Jules Verne, Le Château des Carpathes (1892), III ; Livre de poche, 1966, p. 37).
JULES VALLÈS (1832-1885) : Voir page spéciale
ÉMILE GABORIAU (1832-1873)
. Le juge Daburon : « Le hasard, voyez-vous, ne sert que les hommes forts, et c’est ce qui indigne les sots. » (Émile Gaboriau, L’Affaire Lerouge (1866), ch. VI ; Livre de poche n°711/712, 1961, p. 122).
AUGUSTE de VILLIERS de L’ISLE-ADAM (1838-1889) : [page spéciale en préparation]
ÉMILE ZOLA (1840-1902) : Voir page spéciale
. On a toujours une strophe à polir, une rime plus sonore à trouver. (Alphonse Daudet, Lettres de mon moulin, « Le poète Mistral » (1866) ; Pléiade tome I, 1986, p. 331).
. Dominique : « Il y a parfois du courage à fuir… » (Alphonse Daudet et Ernest L’Épine, Le Frère aîné (1867), scène II ; dans Théâtre, A. Lemerre, 1889, p. 160).
. Où serait le mérite, si les héros n'avaient jamais peur… (Alphonse Daudet, Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon (1872), III, v ; Pléiade tome I, 1986, p. 545).
. Plus tard [= après la publication d’un livre], à cette joie d’inventeur se mêle un peu de tristesse, le regret de n’avoir pas dit tout ce que l’on voulait dire. L'œuvre qu'on portait en soi paraît toujours plus belle que celle qu'on a faite. Tant de choses se perdent dans ce voyage de la tête à la main ! (Alphonse Daudet, Contes du lundi, « Le dernier livre » (1871) ; Pléiade tome I, 1986, p. 739).
. Le peintre : « Ah ! que j’en ai connu de ces intérieurs disparates où la femme était tantôt bourreau, tantôt victime, plus souvent bourreau que victime, et presque toujours sans s’en douter ! » (Alphonse Daudet, Les Femmes d'artistes, prologue, A. Lemerre, 1874, p. 8).
. Oh ! les applaudissements, ce bruit de grêle qui a de si douces résonnances dans les couloirs, la salle, les coulisses, lorsqu’une fois on l’a connu, il est impossible de s’en passer. Les grands comédiens ne meurent ni de maladie ni de vieillesse ; ils cessent d'exister quand on ne les applaudit plus. (Alphonse Daudet, Les Femmes d'artistes, IV. « Un ménage de chanteurs », A. Lemerre, 1874, p. 62).
. Il n'est pas défendu, en littérature, de ramasser une arme rouillée ; l'important est de savoir aiguiser la lame et d'en reforger la poignée à la mesure de sa main. (Alphonse Daudet, Trente ans de Paris (1888), « Henri Rochefort » ; dans Œuvres complètes illustrées, tome XII, Librairie de France, 1930, p. 52).
. « La gloire est pareille à un cigare que l’on mettrait dans sa bouche par le bout allumé. D'abord ça brûle ; puis on ne sent plus que la cendre. » (Alphonse Daudet, propos oral rapporté par son fils Léon Daudet dans Études et milieux littéraires, chap. VII, Grasset, 1927, p. 251).
CATULLE MENDÈS (1841-1909)
. Fabien Liberge : « La calomnie est inutile où la médisance suffit. » (Catulle Mendès, Le Chercheur de tares (1898), I, xxvii ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 374).
ANATOLE FRANCE (1844-1924) : [page spéciale en préparation]
LÉON BLOY (1846-1917) : Voir page spéciale
JORIS-KARL HUYSMANS (1848-1907)
. Folantin : « Ah ! décidément Paris devient un Chicago sinistre ! […] Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau-Monde ! » (Joris-Karl Huysmans, À vau-l'eau (1882), II ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 506).
. Presque tous faisaient partie de la jeunesse des écoles, de cette glorieuse jeunesse dont les idées subalternes assurent aux classes dirigeantes l'immortel recrutement de leur sottise. (Joris-Karl Huysmans, À vau-l'eau (1882), III ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 510).
. Pourquoi la religion consolatrice n’est-elle faite que pour les pauvres d’esprit ? Pourquoi l'Église a-t-elle voulu ériger en dogmes les croyances les plus absurdes ? (Joris-Karl Huysmans, À vau-l'eau (1882), IV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 522).
. Son mépris de l’humanité s’accrut ; il comprit enfin que le monde est, en majeure partie, composé de sacripants et d’imbéciles. Décidément, il n’avait aucun espoir de découvrir chez autrui les mêmes aspirations et les mêmes haines. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), notice ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 582).
. Il suffit qu’on soit dans l’impossibilité de se rendre à un endroit pour qu’aussitôt le désir d’y aller vous prenne. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), notice ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 584).
. Le mouvement lui paraissait dailleurs inutile et l’imagination lui semblait pouvoir aisément suppléer à la vulgaire réalité des faits. […] Le tout est de savoir s’y prendre, de savoir concentrer son esprit sur un seul point, de savoir s’abstraire suffisamment pour amener l’hallucination et pouvoir substituer le rêve de la réalité à la réalité même. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), II ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 594 et 595).
. Des Esseintes : « L’instruction universelle […] s’ingénie, au lieu de crever définitivement et par compassion les yeux des misérables, à les leur ouvrir tout grands et de force, pour qu’ils aperçoivent autour d’eux des sorts immérités et plus cléments, des joies plus laminées et plus aigües et, par conséquent, plus désirables et plus chères. / […] Le fait est que, comme la douleur est un effet de l’éducation, comme elle s’élargit et s’acière à mesure que les idées naissent : plus on s’efforcera d’équarrir l’intelligence et d’affiner le système nerveux des pauvres diables, et plus on développera en eux les germes si furieusement vivaces de la souffrance morale et de la haine. » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), VI ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 640-641).
. Il savait pourtant bien, en descendant en lui, qu’il n’aurait jamais l’esprit d’humilité et de pénitence vraiment chrétien ; il savait, à n’en pouvoir hésiter, que ce moment […] de la grâce […] ne viendrait jamais pour lui ; il n’éprouvait pas de besoin de mortification et de prière sans lequel, si l’on écoute la majeure partie des prêtres, aucune conversion n’est possible ; il ne ressentait aucun désir d’implorer un Dieu dont la miséricorde lui semblait des moins probables. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), VII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 643-644).
. Il persistait à considérer la religion ainsi qu’une superbe légende, qu’une magnifique imposture. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), VII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 645).
. Il était satisfait de cet aveu de l’ordure sociale, mais alors, il se révoltait contre le vague remède d’une espérance en une autre vie. Schopenhauer était plus exact. […] Lui aussi prêchait le néant de l’existence, les avantages de la solitude, avisait l’humanité que quoi qu’elle fît, de quelque côté qu’elle se tournât, elle demeurerait malheureuse : pauvre, à cause des souffrances qui naissent des privations ; riche, en raison de l’invincible ennui qu’engendre l’abondance ; mais il ne vous prônait aucune panacée, ne vous berçait, pour remédier à d’inévitables maux, par aucun leurre. / Il ne vous soutenait pas le révoltant système du péché originel ; ne tentait point de vous prouver que celui-là est un Dieu souverainement bon qui protège les chenapans, aide les imbéciles, écrase l’enfance, abêtit la vieillesse, châtie les incoupables ; il n’exaltait pas les bienfaits d’une Providence qui a inventé cette abomination, inutile, incompréhensible, injuste, inepte, la souffrance physique. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), VII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 648).
. Le plus bel air du monde devient vulgaire, insupportable, dès que le public le fredonne, dès que les orgues s’en emparent, l’œuvre d’art qui ne demeure pas indifférente aux faux artistes, qui n’est point contestée par les sots, qui ne se contente pas de susciter l’enthousiasme de quelques-uns devient, elle aussi, par celà même, pour les initiés, polluée, banale, presque repoussante. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), IX ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 662).
. Des Esseintes : « Par le temps qui court, il n’existe plus de substance saine, […] le vin qu’on boit et la liberté qu’on proclame, sont frelatés et dérisoires, […] il faut enfin une singulière dose de bonne volonté pour croire que les classes dirigeantes sont respectables et que les classes domestiquées sont dignes d’être soulagées ou plaintes. » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), X ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 679).
. À quoi bon bouger, quand on peut voyager si magnifiquement sur une chaise ? […] Que pouvait-il donc espérer, sinon de nouvelles désillusions […] ? (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XI ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 691-692).
. L’avenir était, en somme, égal pour tous et, ni les uns, ni les autres, s’ils avaient eu un peu de bon sens, n’auraient pu s’envier. Pour les riches, c’étaient dans un milieu différent, les mêmes passions, les mêmes tracas, les mêmes peines, les mêmes maladies, et c’étaient aussi, les mêmes jouissances médiocres, qu’elles fussent alcoliques, littéraires ou charnelles. […] / Quelle folie que de procréer des gosses ! (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 717).
. Des Esseintes : « Quelle singulière époque […] que celle qui, tout en invoquant les intérêts de l’humanité, cherche à perfectionner les anesthésiques pour supprimer la souffrance physique et prépare, en même temps, de tels stimulants pour aggraver la douleur morale ! » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 718).
. Au fond, le résumé de la sagesse humaine consist[e] à traîner les choses en longueur ; à dire non, puis enfin oui ; car l’on ne mani[e] vraiment les générations qu’en les lanternant ! (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIII ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 723).
. Tout en désirant se dégager des préjugés, s’abstenir de toute passion, chacun va de préférence aux œuvres qui correspondent le plus intimement à son propre tempérament et finit par reléguer en arrière toutes les autres. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 725).
. Lorsque l’époque où un homme de talent est obligé de vivre, est plate et bête, l’artiste est, à son insu même, hanté par la nostalgie d’un autre siècle. (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 726).
. Des Esseintes : « Mon Dieu ! mon Dieu ! qu’il existe donc peu de livres qu’on puisse relire ! » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XIV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 740).
. Des Esseintes : « Mais ça ne me distrait pas, moi, les plaisirs des autres ! » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 755).
. Des Esseintes : « Il faudrait pouvoir s’empêcher de discuter avec soi-même […] ; il faudrait pouvoir fermer les yeux, se laisser emporter par ce courant, oublier ces maudites découvertes qui ont détruit l’édifice religieux, du haut en bas, depuis deux siècles. / Et encore […], ce ne sont ni les physiologistes ni les incrédules qui démolissent le catholicisme, ce sont les prêtres, eux-mêmes, dont les maladroits ouvrages extirperaient les convictions les plus tenaces. » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XV ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 759).
. Après l’aristocratie de la naissance, c’était maintenant l’aristocratie de l’argent ; c’était le califat des comptoirs, le despotisme de la rue du Sentier, la tyrannie du commerce aux idées vénales et étroites, aux instincts vaniteux et fourbes. / Plus scélérate, plus vile que la noblesse dépouillée et que le clergé déchu, la bourgeoisie leur empruntait leur ostentation frivole, leur jactance caduque, qu’elle dégradait par son manque de savoir-vivre, leur volait leurs défauts qu’elle convertissait en d’hypocrites vices. […] / C’était le grand bagne de l’Amérique transporté sur notre continent ; c’était enfin, l’immense, la profonde, l’incommensurable goujaterie du financier et du parvenu, rayonnant, tel qu’un abject soleil, sur la ville idolâtre qui éjaculait, à plat ventre, d’impurs cantiques devant le tabernacle impie des banques ! / « Eh ! croule donc, société ! meurs donc, vieux monde ! » (Joris-Karl Huysmans, À rebours (1884), XVI ; dans Romans tome 1, Bouquins, 2005, p. 760 et 761).
. Des Hermies : « Ce que je reproche au naturalisme, ce n’est pas le lourd badigeon de son style, c’est l’immondice de ses idées ; ce que je lui reproche, c’est d’avoir incarné le matérialisme dans la littérature, d’avoir glorifié la démocratie de l’art ! » (Joris-Karl Huysmans, Là-bas (1891), I ; coll. G.F. n°302, 1978, p. 33).
. On peut l'affirmer : la société n'a fait que déchoir depuis les quatre siècles qui nous séparent du Moyen Age. (Joris-Karl Huysmans, Là-bas (1891), VIII ; coll. G.F. n°302, 1978, p. 128).
. La bourgeoisie a remplacé la noblesse sombrée dans le gâtisme ou dans l’ordure ; c’est à elle que nous devons l’immonde éclosion des sociétés de gymnastique et de ribote, les cercles de paris mutuels et de courses. Aujourd'hui, le négociant n'a plus qu'un but, exploiter l'ouvrier, fabriquer de la camelote, tromper sur la qualité de la marchandise, frauder sur le poids des denrées qu'il vend. (Joris-Karl Huysmans, Là-bas (1891), VIII ; coll. G.F. n°302, 1978, p. 130).
. Durtal : « Le dilettante n’a pas de tempérament personnel, puisqu’il n’exècre rien et qu’il aime tout ; or, quiconque n’a pas de tempérament personnel n’a pas de talent. » (Joris-Karl Huysmans, Là-bas (1891), XVI ; éd. G-F n° 302, 1978, p. 218).
. L'Église sait pourtant que la charogne du riche purule autant que celle du pauvre et que son âme pue davantage encore ; mais elle brocante les indulgences et bazarde les messes ; elle est, elle aussi, ravagée par l’appât du lucre ! (Joris-Karl Huysmans, En route (1895), I, 1 ; Folio n°2873, 1996, p. 73-74).
. L’abbé Gévresin : « L’important, c’est de n’aimer que corporellement la femme. Quand le Ciel vous a départi cette grâce de n’être pas pris par les sentiments, avec un peu de bonne volonté tout s’arrange. » (Joris-Karl Huysmans, En route (1895), I, 5 ; Folio n°2873, 1996, p. 141).
. L’abbé Gévresin : « Celui qui commet indûment l’acte de chair est presque toujours, de son vivant, puni. Pour les uns, ce sont des bâtards à élever, des femmes infirmes, de bas concubinages, des carrières brisées, d’abominables duperies de la part de celles qu’ils aiment. De quelque côté que l’on se tourne avec la femme, on souffre, car elle est le plus puissant engin de douleur que Dieu ait donné à l’homme ! » (Joris-Karl Huysmans, En route (1895), I, 5 ; Folio n°2873, 1996, p. 150-151).
. A-t-on péché et dans quelle mesure ? Dieu, seul, le sait. / Pour se consoler, il sied de se répéter que le démon ne peut rien sur la volonté, très peu sur l'intelligence et tout sur l'imagination. (Joris-Karl Huysmans, L’Oblat (1903), V ; Plon, 1908, p. 100).
. Hélas ! dans quel état d'abandon et d'anémie se trouve l'Église, depuis qu'elle s'est désintéressée de l'art et que l'art s'est retiré d'elle ! Elle a perdu son meilleur mode de propagande, son plus sûr moyen de défense. (Joris-Karl Huysmans, L’Oblat (1903), XII ; Plon, 1908, p. 295).
. Durtal : « Un vrai moine n’a qu’une patrie, son couvent. » (Joris-Karl Huysmans, L’Oblat (1903), XIV ; Plon, 1908, p. 345).
. Durtal : « J'ai bien peur que la mère Bavoil n'ait raison lorsqu'elle prédit d'épouvantables châtiments ; ce que la patience de Dieu doit être à bout ! D'ailleurs, rien ne tient plus ; tout s'écroule ; c'est la faillite dans tous les camps, faillite de la science matérialiste et faillite de l'éducation des grands séminaires et des Ordres, en attendant la banqueroute générale qui ne peut tarder ! Les anarchistes ont peut-être raison. L'édifice social est si lézardé, si vermoulu, qu'il vaudrait mieux qu'il s'effondrât ; on verrait à le reconstruire, à neuf, après. / En attendant, il est fort à craindre que le Seigneur ne nous laisse mijoter dans notre jus et n’intervienne que lorsque nous serons tout à fait cuits ; si seulement nous étions cet or dans la fournaise dont parle la Bible, mais, va te faire fiche, nous ne sommes que de la râclure de plomb dans une cocotte de cuisine ; nous fondrons sans nous épurer. » (Joris-Karl Huysmans, L’Oblat (1903), XV ; Plon, 1908, p. 356-357).
. « La femme n'a pas à être intelligente, au sens que nous donnons à ce mot : elle a à être experte en plaisirs charnels et en bons soins. Là se borne son rôle, alors qu'elle cohabite avec l'homme, et c'est pourquoi les idées d'émancipation dont on nous rebat actuellement les oreilles me semblent absurdes. » (Joris-Karl Huysmans, entretien paru dans Gil Blas le 1er février 1895 ; repris dans Interviews (éd. Jean-Marie Seillan), Honoré Champion, 2002, p. 175).
OCTAVE MIRBEAU (1848-1917) : Voir page spéciale
. Avec l'habitude de la continence, les sens aussi s'endorment – pendant des périodes bien longues. (Pierre Loti, Pêcheur d'Islande (1886), I, vi ; Folio n°1982, 1988, p. 100).
. De loin, tout paraît toujours si facile, si simple à dire et à faire. (Pierre Loti, Pêcheur d'Islande (1886), II, xi ; Folio n°1982, 1988, p. 146).
. La guerre, le feu, il ne s’en faisait encore qu’une idée incomplète ; mais celà le fascinait pourtant, parce qu’il était de vaillante race. (Pierre Loti, Pêcheur d'Islande (1886), II, xiii ; Folio n°1982, 1988, p. 157).
. Sans toute sa souffrance d’avant, l’heure présente n’eût pas été si délicieuse. (Pierre Loti, Pêcheur d'Islande (1886), IV, v ; Folio n°1982, 1988, p. 241).
GUY de MAUPASSANT (1850-1893) : [page spéciale en préparation]
ÉLÉMIR BOURGES (1852-1925) : Voir page spéciale
PAUL BOURGET (1852-1935) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de droite]
LAURENT TAILHADE (1854-1919) : [voir page en préparation dévolue aux poètes français modernes]
. Quand la gourmandise les prend, les plus sages sont les plus folles, toutes les femmes ont l’heure du charreton […] ; en politique, comme en amour, le succès est aux beaux sanguins, qui hussardent. (Jean Lorrain, Très russe (1886), III, xi ; Œuvres romanesques, tome 1, Coda, 2007, p. 147).
. La tristesse de la vie, c'est la déprimante certitude que l'on a du recommencement de tout, du manque absolu d'imprévu, de nouveau et d'aventure, et du perpétuel ressassement des mêmes stupides ennuis. C'est cette désespérante certitude, dis-je, jointe à l'expérience acquise que les rares heures de passion vécue, douleur ou joie, ne se revivront jamais plus, que tenter de les évoquer est folie et que tout est cendre et poussière dans la bouche, sous les dents demeurées gourmandes des sensations à jamais disparues. (Jean Lorrain, Buveurs d’âmes (1893), « Le Buveur d'âmes », II, 7 juin ; Œuvres romanesques, tome 1, Coda, 2007, p. 268).
. Les yeux des hommes écoutent ; il y en a même qui parlent, tous surtout sollicitent, tous guettent et épient, mais aucun ne regarde. L'homme moderne ne croit plus, et voilà pourquoi il n'a plus de regard. (Jean Lorrain, Monsieur de Phocas (1901), 4, 30 avril 1897 ; coll. 10/18 n°881, 1974, p. 83).
. La présence des autres m'est devenue plus intolérable encore, leur conversation surtout ! Oh ! comme elle m'angoisse et comme elle m'exaspère, et leur attitude, et leur façon d'être, et tout, et tout !… Les gens de mon monde, mes tristes pareils, comme tout ce qui vient d'eux m'irrite, m'attriste et m'oppresse, leur vide et bruyant bavardage, leur perpétuelle et monstrueuse vanité, leur effarant et plus monstrueux égoïsme, leurs propos de cleube ! / Oh ! le ressassage des opinions toutes faites et des jugements appris, le vomissement automatique des articles lus, le matin, dans les feuilles et qu’on reconnaît au passage, leur désespérant désert d’idées. (Jean Lorrain, Monsieur de Phocas (1901), 9, juin 1898 ; coll. 10/18 n°881, 1974, p. 121-122).
[citations en attente de vérification]
. Le premier soin de l’homme supérieur, dès qu’il est conscient de lui-même, réside à sculpter, à ciseler son être moral. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), I, i ; Robert Dumas éd., 1975, p. 23).
. La Société est une entreprise anonyme pour la vie à émotions réduites. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), I, i ; Robert Dumas éd., 1975, p. 29).
. Tu seras avocat, c’est-à-dire un scélérat, complice de tous les crimes, recéleur de tous les vols, participant à toutes infamies ; entre le mal et la justice, tu jetteras le jeu de l’acteur, le mensonge de la femme, la mauvaise foi du protestant ; ta gloire sera de faire innocent le coupable ; et telle est l’injustice humaine, que toi l’empêcheur de justice, tu es utile. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), I, i ; Robert Dumas éd., 1975, p. 29).
. Dans tous les temps, les hommes supérieurs ont été des hommes singuliers, et il vaut mieux souffrir d'être trop soi-même que de jouir au prix de la ressemblance avec les autres. [2] (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), I, vii ; Robert Dumas éd., 1975, p. 132).
. La femme, en perpétuel déficit de personnalité, n’a pas donné à l’histoire de solitaires ; ermite n’a pas de féminin. / Or, le malheureux devient femme, c’est-à-dire subordonné à l’autrui cosmique ou social. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), II, ix ; Robert Dumas éd., 1975, p. 237).
. Quand le dessein d’une vie s’oriente vraiment vers l’absolu, l’insuccès n’a pas l’importance qu’il occupe auprès de l’aventurier. / L’ambitieux qui avorte, perd vraiment tout, car son dessein ne pouvait exister que par la réalisation ; au contraire, le penseur inécouté ou persécuté, garde toute sa valeur : il suffit qu’il continue à penser, pour n’être pas vaincu. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), II, ix ; Robert Dumas éd., 1975, p. 237).
. L’homme de pensée et d’art, placé entre la honte lucrative de plaire au public, le reniement de toute dignité de complaire à une République, et l’impossible, même avec vilenies, de plaire aux riches, se trouve singulièrement empêché. / […] Littéralement, celui qui conquiert les suffrages contemporains peut se considérer comme un néant. […] Au lieu de recevoir du présent la matière de son œuvre, il faut à grand effort se rejeter dans le passé et créer un antagonisme avec son temps. (Joséphin Péladan, Amphithéâtre des sciences mortes I. Comment on devient mage, éthique (1892), II, x ; Robert Dumas éd., 1975, p. 248-249).
REMY de GOURMONT (1858-1915) : [page spéciale en préparation]
GEORGES COURTELINE (1858-1929) : Voir page spéciale
. L’héroïsme n’exige aucune maturité d’esprit. (Abel Hermant, Xavier ou les entretiens sur la grammaire française, V, éd. « Le Livre », 1923, p. 123).
. Je maintiens le principe : la première vertu d'un écrivain est la propriété du vocabulaire. Mais tentez-vous de définir en quoi consiste cette propriété, c'est alors que les difficultés commencent. (Abel Hermant, Lettres à Xavier sur l'art d'écrire (1926), III ; Hachette, collection des muses, 1932, p. 54).
GEORGES DARIEN (1862-1921) : Voir page spéciale
MAURICE BARRÈS (1862-1923) : [page spéciale en préparation]
JULES RENARD (1864-1910) : Voir page spéciale
. M. Lenormand (Arsène Lupin) : « Les faits ne valent pas contre la raison et la logique. » (Maurice Leblanc, 813 (1910), I, 2, 1 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 294).
. Paul Sernine (Arsène Lupin) : « Je suis de ceux qui marchent seuls. Si tu étais mon égal, comme tu le prétends, l’idée ne te serait jamais venue d’une association. Quand on a la taille d’un chef, on commande. S’unir, c’est obéir. Je n’obéis pas ! » (Maurice Leblanc, 813 (1910), I, 6, 2 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 355).
. Paul Sernine (Arsène Lupin) : « Veuille bien te rappeler le secret de ma supériorité : une âme intrépide dans un corps inattaquable. » (Maurice Leblanc, 813 (1910), I, 6, 3 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 359).
. Arsène Lupin : « C’est tout celà, dira-t-on ? Oui, c’est tout celà, mais il fallait y penser. » (Maurice Leblanc, 813 (1910), II, 8, 1 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 381).
. Arsène Lupin : « Crânons, mon vieux, crânons, les dieux te contemplent. » (Maurice Leblanc, 813 (1910), II, 16, 3 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 497).
. L’Empereur d’Allemagne : « Entrez à mon service. Je vous offre le commandement de ma police personnelle. Vous serez le maître absolu. Vous aurez tous pouvoirs, même sur l’autre police. » — Arsène Lupin : « Non, Sire. » — « Pourquoi ? » — « Je suis français. » […] — « Cependant, puisqu’aucun lien ne vous attache plus… » — « Celui-là ne peut pas se dénouer, Sire. » (Maurice Leblanc, 813 (1910), épilogue, 1 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 504).
. Don Luis Perenna (Arsène Lupin) : « Il y a miracle si l'on accepte les explications surnaturelles. Il y a phénomène naturel si l'on recherche et si on trouve les causes physiques, capables de susciter le miracle apparent. » (Maurice Leblanc, L'Île aux trente cercueils (1919), II, 9 ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 1034).
. Serge Rénine (Arsène Lupin) : « La seule joie qui se renouvelle toujours, c'est celle du combat. Après, celà n'a plus d'intérêt. » (Maurice Leblanc, Les Huit coups de l'horloge, II. « La carafe d’eau » (1922) ; Bouquins Arsène Lupin, tome 2, 1986, p. 168).
. Rouxval : « Mais, sapristi, de quelle chose est-il question ? » — Hercule Petitgris : « De la vérité, mossieur le Ministre. Il y a des instants, quand l’heure est venue, où l’on ne peut pas l’empêcher de sortir de son puits. Elle entre par la fenêtre si la porte est close. » (Maurice Leblanc, La Dent d’Hercule Petitgris (1924) ; Bouquins Arsène Lupin, tome 5, 1988, p. 18).
. La ligne est vague et conventionnelle entre ce qui est vraisemblable et ce qui ne l’est point. Il suffit de bien peu de chose pour qu’une œuvre d’imagination tourne vers la parodie et que des personnages qu’on a voulus pathétiques fassent figure comique et absurde. (Maurice Leblanc, La Vie extravagante de Balthazar (1925), avertissement liminaire ; Bouquins Arsène Lupin, tome 5, 1988, p. 158).
. Balthazar : « Il faut tenir nos passions en laisse et réduire nos rêves à la mesure de nos pauvres vies humaines. » (Maurice Leblanc, La Vie extravagante de Balthazar (1925), I ; Bouquins Arsène Lupin, tome 5, 1988, p. 163).
. Balthazar : « Le bonheur n’est pas dans les grandes joies [ni] les grands sentiments, mais dans les petites choses et les petits attachements. Ne s’intéresser qu’à ce qu’on voit et à ce qu’on touche. Borner son ambition à ce que la main peut atteindre. Ne pas rêver. Ne pas s’exalter. Découvrir le charme des actes les plus vulgaires. » (Maurice Leblanc, La Vie extravagante de Balthazar (1925), II ; Bouquins Arsène Lupin, tome 5, 1988, p. 169).
. Il nous est plus difficile de connaître la raison de notre bonheur que celle de nos tourments. (Maurice Leblanc, La Vie extravagante de Balthazar (1925), titre du chapitre IX ; Bouquins Arsène Lupin, tome 5, 1988, p. 217).
. Horace Velmont (Arsène Lupin) : « Prendre est plus difficile que gagner. Et l’on risque bien plus ! Le fait seul de posséder crée un état d’âme impitoyable. Et plus on avance en âge, plus cet état d’âme s’aggrave. » (Maurice Leblanc, Les Milliards d'Arsène Lupin (1939), IV ; Bouquins Arsène Lupin, tome 4, 1987, p. 864).
HENRI de RÉGNIER (1864-1936) : [voir page en préparation dévolue aux poètes français modernes]
. Hoche : « Quand l'ordre est l'injustice, le désordre est déjà un commencement de justice. » (Romain Rolland, Théâtre de la révolution I. Le 14 juillet (1902), acte I, Albin Michel, 1926, p. 36).
. Le devoir est exceptionnel. Mais l’amour ne l’est pas moins. Tout est exceptionnel. Tout ce qui vaut quelque chose n’a pas de pire ennemi – non pas que ce qui est mal (les vices ont leur prix) –, mais que ce qui est habituel. L'ennemi mortel de l'âme, c'est l'usure des jours. (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome III. L’adolescent (1904), III ; Livre de poche n°734, 1980, p. 326).
. Le critique qui s’acharne à rabaisser à sa taille les grands hommes et les grandes pensées, la fille qui s’amuse à avilir ses amants, sont deux bêtes malfaisantes de la même sorte. Mais la seconde est plus aimable. (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome III. L’adolescent (1904), III ; Livre de poche n°734, 1980, p. 326).
. Gottfried : « Pourquoi te chagriner de ce que tu ne peux pas faire ? Il faut faire ce qu’on peut… […] » — Christophe : « C’est trop peu. » […] — Gottfried : « C’est plus que personne ne fait. Tu es un orgueilleux. Tu veux être un héros. C’est pour celà que tu ne fais que des sottises… Un héros ! Je ne sais pas trop ce que c’est ; mais, vois-tu, j’imagine : un héros, c'est celui qui fait ce qu'il peut. Les autres ne le font pas. » — Christophe : « Ah ! […] à quoi bon vivre alors ? Celà n’en vaut pas la peine. Il y a pourtant des gens qui disent que "vouloir c’est pouvoir !…" » […] — Gottfried : « Oui ?… Eh bien, ce sont de grands menteurs, mon petit. Ou ils ne veulent pas grand-chose… » (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome III. L’adolescent (1904), III ; Livre de poche n°734, 1980, p. 351).
. La défaite reforge les élites ; elle fait le tri des âmes ; elle met de côté ce qui est pur et fort ; elle le rend plus pur et plus fort. Mais elle précipite la chute des autres, ou brise leur élan. Par là, elle sépare le gros du peuple, qui tombe, de l’élite qui continue sa marche. L’élite le sait, et elle en souffre ; même chez les plus vaillants, il y a une mélancolie secrète, le sentiment de leur impuissance et de leur isolement. (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome VII. Dans la maison (1908), II ; Livre de poche n°779-780, 1969, p. 414).
. Celui qu'on aime a tout droit contre vous, même de ne plus vous aimer. On ne peut lui en vouloir, on ne peut que s’en vouloir d’être si peu digne d’amour, puisqu’il vous abandonne. Et c’est une peine mortelle. (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome VII. Dans la maison (1908), II ; Livre de poche n°779-780, 1969, p. 435).
. Le hasard sait trouver ceux qui savent s'en servir. (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome VII. Dans la maison (1908), II ; Livre de poche n°779-780, 1969, p. 455). [3]
. Jean-Christophe : « Personne n’est complet. Le bonheur est de connaître ses limites et de les aimer. » (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome VIII. Les amies (1910) ; Livre de poche n°806-807, 1962, p. 96).
. La trahison pour elle n’était pas tant dans l’acte, que dans la volonté. Elle eût pardonné plus aisément à celui qu’elle aimait d’avoir une maîtresse, que d’avoir en secret donné son cœur à une autre. Et elle avait raison. / La belle affaire ! diront certains… – Les pauvres êtres qui ne souffrent d’une trahison d’amour, que si elle est consommée… Quand le cœur reste fidèle, les vilenies du corps sont peu de chose. Quand le cœur a trahi, le reste n’est plus rien… (Romain Rolland, Jean-Christophe, tome VIII. Les amies (1910) ; Livre de poche n°806-807, 1962, p. 125).
. Colas Breugnon : « C'est vrai, il n'est rien de tel que d'être en foule pour n'avoir plus le sens commun. Cent sages font un fou, et cent moutons un loup… » (Romain Rolland, Colas Breugnon (1914), II ; Albin Michel, 1978, p. 39-40).
. Nous : « Étions-nous bêtes de nous battre pour le profit de nos gardiens ! Si nous n’avions pas d’ennemis, ils en inventeraient, parbleu ! pour nous défendre. Grand merci ! Dieu nous sauve de nos sauveurs ! Nous nous sauverons bien tout seuls. Pauvres moutons ! Si nous n'avions à nous défendre que du loup, nous saurions bien nous en garder. Mais qui nous gardera du berger ? » (Romain Rolland, Colas Breugnon (1914), II ; Albin Michel, 1978, p. 46).
. Je n’élève point des statues de héros inaccessibles. Je hais l’idéalisme couard, qui détourne les yeux des misères de la vie et des faiblesses de l’âme. Il faut le dire à un peuple trop sensible aux illusions décevantes des paroles sonores : le mensonge héroïque est une lâcheté. Il n'y a qu'un héroïsme au monde : c'est de voir le monde tel qu'il est, – et de l'aimer. (Romain Rolland, Vie de Michel-Ange (1907), liminaire ; Hachette, 1946, p. 10-11).
. La plus belle théorie n'a de prix que par les œuvres où elle s'accomplit. (Romain Rolland, Vie de Tolstoï (1911), 13 ; Hachette, 1946, p. 128).
. Un Français ne croit pas à la fatalité. La fatalité, c’est l'excuse des âmes sans volonté. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, I. « Lettre ouverte à Gerhart Hauptmann » (29 août 1914), Ollendorff, 1915, p. 6).
. On entend, une fois de plus, le refrain séculaire : « Fatalité de la guerre, plus forte que toute volonté », – le vieux refrain des troupeaux, qui font de leur faiblesse un dieu, et qui l’adorent. Les hommes ont inventé le destin, afin de lui attribuer les désordres de l’univers, qu’ils ont pour devoir de gouverner. Point de fatalité ! La fatalité, c’est ce que nous voulons. Et c’est aussi, plus souvent, ce que nous ne voulons pas assez. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, III. « Au-dessus de la mêlée » (15 septembre 1914), Ollendorff, 1915, p. 26).
. Depuis plus de quarante siècles, l’humanité n’a point cessé de rester asservie – je ne dis pas à des maîtres […] – mais aux fantômes de son esprit. Sa servitude est en elle. On s’épuise à trancher les liens qui l’enserrent. Elle les renoue aussitôt pour mieux se ligoter. De chaque libérateur elle se fait un maître, et de chaque idéal qui devait l’affranchir elle fabrique aussitôt une idole grossière. L’histoire de l’humanité est l’histoire des idoles et de leurs règnes successifs. Et l’on dirait qu’à mesure que l’humanité vieillit, le pouvoir de l’idole est plus vaste et plus meurtrier. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, IX. « Les idoles » (4 décembre 1914), Ollendorff, 1915, p. 84).
. Le trait commun au culte de toutes les idoles est l’adaptation d’un idéal aux mauvais instincts de l’homme. L’homme cultive les vices qui lui sont profitables ; mais il a le besoin de les légitimer ; il ne veut pas les sacrifier : il faut qu’il les idéalise. C’est pourquoi le problème auquel il n’a cessé de travailler, au cours des siècles, a été de mettre d’accord son idéal avec sa médiocrité. Il y est toujours arrivé. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, IX. « Les idoles » (4 décembre 1914), Ollendorff, 1915, p. 85-86).
. Donnez à un intellectuel n’importe quel idéal et n’importe quelle mauvaise passion, il trouvera toujours moyen de les ajuster ensemble. […] Un intellectuel habile est un prestidigitateur de la pensée… […] Le glorieux est de faire sortir d’une pensée son contraire, la guerre entre les hommes du Sermon sur la Montagne, ou, comme le professeur Ostwald, du rêve d’un internationalisme intellectuel la dictature militaire du Kaiser. Pour ces Robert-Houdin, ce n’est qu’un jeu d’enfants. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, IX. « Les idoles » (4 décembre 1914), Ollendorff, 1915, p. 86-87).
. Le vrai intellectuel, le vrai intelligent, est celui qui ne fait pas de soi et de son idéal, le centre de l'univers, mais qui, regardant autour, voit, comme dans le ciel le flot de la Voie Lactée, les milliers de petites flammes qui coulent avec la sienne, et qui ne cherche ni à les absorber, ni à leur imposer sa route, mais à se pénétrer religieusement de leur nécessité à toutes et de la source commune du feu qui les alimente. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, IX. « Les idoles » (4 décembre 1914), Ollendorff, 1915, p. 96).
. Il est bien entendu que ces dénominations d’Asie et d’Afrique n’ont pas un caractère géographique, mais ethnologique. La Turquie n’est pas, n’a jamais été européenne ; et c’est une question de savoir jusqu’à quel point le sont certaines des puissances balkaniques. (Romain Rolland, Au-dessus de la mêlée, Notes, Ollendorff, 1915, p. 163).
. Ce qui est aujourdhui plus rare que l’héroïsme, plus rare que la beauté, plus rare que la sainteté, c’est une conscience libre. Libre de toute contrainte, libre de tout préjugé, libre de toute idole, de tout dogme de classe, de caste, de nation, de toute religion. Une âme qui ait le courage et la sincérité de regarder avec ses yeux, d’aimer avec son cœur, de juger avec sa raison, de n’être pas une ombre, – d’être un homme. (Romain Rolland, Les Précurseurs, « Tolstoï : l’esprit libre » (mai 1917), Éditions de l’Humanité, 1920, p. 42).
. Le pire mal dont souffre le monde est […], non la force des méchants, mais la faiblesse des meilleurs. Et cette faiblesse a en grande partie sa source dans la paresse de volonté, dans la peur de jugement personnel, dans la timidité morale. (Romain Rolland, Les Précurseurs, « Tolstoï : l’esprit libre » (mai 1917), Éditions de l’Humanité, 1920, p. 43).
TRISTAN BERNARD (1866-1947) : Voir page spéciale dévolue aux humoristes
. Le baron de Chemillé : « La pudeur ! […] quelle chose exquise ! Et, tenez, elle est peut-être le plus substantiel aliment de l’amour. La dédaigner est le fait d’un tempérament affaibli qui renie par impuissance le noble désir de conquête ou le secret appétit du viol, qui est le propre de la virilité. À parler franc, l’homme méprise la femme qui se donne à lui ; il a le goût de la lutte, du combat ; il aime enlever la femelle de vive force, et l’orgueil de la victoire le dispose au sentiment durable de l’amour. » (René Boylesve, La Leçon d’amour dans un parc (1902), chap. VII ; Livre de poche n°2702, 1972, p. 41).
. Le baron de Chemillé : « L'intelligence ne consiste pas à avoir appris beaucoup, mais à être apte à tout deviner. » (René Boylesve, La Leçon d’amour dans un parc (1902), chap. XI ; Livre de poche n°2702, 1972, p. 65).
. Lorsqu’on a commencé de souffrir par un grand amour, toute douleur nouvelle est plus avidement souhaitée qu’un rendez-vous par un amant heureux. (René Boylesve, La Leçon d’amour dans un parc (1902), chap. XX ; Livre de poche n°2702, 1972, p. 168).
. Les exemples du monde et la philosophie sont peu de chose au prix d'une gouttelette de beau sang. (René Boylesve, La Leçon d’amour dans un parc (1902), chap. XX, derniers mots du roman ; Livre de poche n°2702, 1972, p. 176).
PAUL-JEAN TOULET (1867-1920) : Voir page spéciale
GUSTAVE LE ROUGE (1867-1938)
. Martial : « Faudra-t-il vous signer un engagement ? » — Le Maître de la Vallée : « Inutile : un honnête homme tient sa parole sans avoir besoin d’écrit, et un coquin se moque d’une signature. » (Gustave Le Rouge, La Vallée du désespoir (1927), chap. VIII ; coll. 10/18 n°1938, La Reine des éléphants, 1988, p. 230).
. La différence et la ressemblance sont des points de vue. Nous ne savons pas distinguer un Chinois d’un autre Chinois, mais les bergers retrouvent leurs moutons à des signes qui nous sont invisibles. Et pour une fourmi les autres fourmis paraissent aussi diverses que nos prêtres, nos soldats et nos marchands. (Marcel Schwob, Le Roi au masque d’or (1892), préface ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 239).
. Ne donnez pas plus de foi à ceux qui montrent la discontinuité, ou les différences individuelles, ou la liberté dans l’univers, qu’à ceux qui vous exposent sa continuité ou ses lois nécessaires. […] Imaginez que la ressemblance est le langage intellectuel des différences, que les différences sont le langage sensible de la ressemblance. (Marcel Schwob, Le Roi au masque d’or (1892), préface ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 242).
. Le dernier élan de foi qui avait entraîné le monde n’avait pu le sauver. […] L’énergie de tous les êtres vivants déclinait. Elle s’était concentrée dans un effort suprême vers une religion future, et l’effort n’avait pas réussi. (Marcel Schwob, Le Roi au masque d’or (1892), « L’incendie terrestre » ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 262).
. Monelle : « Bâtis ta maison toi-même et brûle-la toi-même. » (Marcel Schwob, Le Livre de Monelle (1894), I ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 401).
. Monelle : « Pense dans le moment. Toute pensée qui dure est contradiction. / Aime le moment. Tout amour qui dure est haine. / Sois sincère avec le moment. Toute sincérité qui dure est mensonge. / Sois juste envers le moment. Toute justice qui dure est injustice. / Agis envers le moment. Toute action qui dure est un règne défunt. / Sois heureux avec le moment. Tout bonheur qui dure est malheur. » (Marcel Schwob, Le Livre de Monelle (1894), I ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 402).
. Les idées des grands hommes sont le patrimoine commun de l’humanité : chacun d’eux ne posséda réellement que ses bizarreries. (Marcel Schwob, Vies imaginaires (1896), préface ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 510).
. L’idéal du biographe serait de différencier infiniment l’aspect de deux philosophes qui ont inventé à peu près la même métaphysique. (Marcel Schwob, Vies imaginaires (1896), préface ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 511).
. Il parlait rarement des dieux, et ne s’en inquiétait pas : peu lui importait qu’il y en eût ou non, et il savait bien qu’ils ne pourraient rien lui faire. (Marcel Schwob, Vies imaginaires (1896), « Cratès » ; Œuvres, Phébus, 2002, p. 526).
HUGUES REBELL (1867-1905) [4]
. Mais si l’artiste a besoin d’un public, il ne peut accepter celui que lui offrirait la démocratie moderne ; il désire l’approbation des esprits, et non l’applaudissement bruyant des foules. Quel idéal d’ailleurs gouverne maintenant les multitudes, si ce n’est le rêve de bien-être le plus grossier […]. Les artistes sont donc fatalement des solitaires […]. Si, par hasard, [leurs pensées] soupçonnent dans leur réclusion le voisinage d’une amie, si elles entreprennent de se confier l’une à l’autre, la grosse voix du geôlier de la démocratie couvre leurs paroles. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 10-11).
. Le dix-neuvième siècle a ainsi réalisé le rêve de la plèbe : le triomphe des individus et la ruine des intelligences. Du moment que toute hiérarchie a disparu, du moment que chacun a le droit de donner son jugement, qu’on en soit persuadé : il n’y a plus de jugement. Liberté de la presse signifie esclavage de la pensée, puissance de tous veut dire oppression des meilleurs. Quand il est permis au premier venu de s’écrier : Racine n’a pas de talent, et qu’on l’écoute, il ne peut se produire de nouveaux Racine. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 11).
. Dans ces sociétés qui se disent démocratiques, on ne rencontre que des gens qui désirent dépasser, effacer leurs voisins. La démocratie signifie pour eux, non point égalité des pouvoirs de tous les hommes, mais un droit personnel à la domination des autres. Si ce désir de puissance venait de la conscience de son propre mérite, il n’aurait rien que de légitime, mais il a pour origine la croyance à l’égalitarisme, cette fausse idée que tous les hommes ont les mêmes aptitudes et les mêmes droits. […] Pour juger du désordre causé par cette morale démocratique, on n’a besoin que de jeter un coup d’œil sur notre société moderne : nul pouvoir n’y est reconnu, personne ne veut obéir, et les chefs légitimes se voyant contester leur droit au commandement, s’en désintéressent et l’abandonnent aux premiers aventuriers qui entreprennent de le saisir. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 12-13).
. Je ne crois pas […] que le christianisme ait été un bienfait pour l’humanité ; les sociétés antiques me paraissent beaucoup mieux constituées que la société chrétienne. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), note n°4, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 18).
. Cet esprit chrétien dont tout aujourd’hui est infecté jusqu’aux hommes qui s’en disent ennemis, pousse les prétendus penseurs à déclamer contre la richesse et à maudire cette classe [=la bourgeoisie] qui a été un artisan de gloire et de beauté ! (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 20-21).
. Je n’attaque nullement le catholicisme, mais bien le christianisme primitif, qui en est fort différent. – Le catholicisme est une religion conforme aux besoins sensuels et sentimentaux de l’humanité, comme les religions antiques, tandis que le christianisme, à son origine, a été surtout un parti populaire, et n’a pu naître et se développer qu’en relevant les pauvres aux détriments des riches. […] Le christianisme avec ces sages moralistes [=Bourdaloue, Bossuet, Massillon] s’humanisait, tandis que les idées qu’il avait apportées au monde allaient porter leurs fruits et, à leur tour, christianiser l’humanité. C’est bien, en effet, les paraboles sentimentales des Évangiles qui ont été le point de départ des froides déductions de Marx et de ses disciples sur le salaire et le capital. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), note n° 5, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 20-21).
. C’est toujours aux israélites que s’attaquent non seulement les socialistes, mais les conservateurs catholiques qui ne voient pas qu’ils se liguent ainsi avec leurs ennemis, – les ennemis de toute civilisation. La haine que l’on porte aux israélites n’est que celle de l’impuissance : si, comprimés, mis hors la loi, persécutés pendant des siècles, il sont arrivés enfin au pouvoir par suite de leur invincible énergie, nous ne pouvons que les admirer et reconnaître nos dominateurs, puisque nous n’avons pas su profiter de nos avantages. – Mais la Démocratie hait tous les riches, chrétiens ou juifs. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), note n° 6, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 23).
. « Nous ne voulons pas plus de supériorités intellectuelles que de supériorités sociales, disent les démocrates : vous, sots, malades, impuissants, vous êtes les égaux des forts, des sains, des intelligents, c’est l’arrêt de notre justice : la nouvelle et la meilleure. » (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 24).
. « Comme certains hommes de constitution robuste et dont la dépense de forces est excessive, ont besoin de plus de nourriture que des hommes d’énergie et de travail ordinaire, nous, qui naturellement et fatalement accomplissons une œuvre supérieure à celle de plusieurs milliers d’êtres, nous avons des besoins et des droits supérieurs. Ces droits, autrefois, notre génie et notre habileté nous les décernaient, mais maintenant, vous voulez nous les retirer ! Apprenez donc ceci : vous nous volez en donnant aux misérables, et comme l’humanité n’est point représentée par la foule, mais par une élite, vous volez aussi l’humanité… » (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 24).
. Quelques-uns disent : Instruisons le peuple. Moi je dis : Instruisons la richesse, instruisons la noblesse. Que ceux-ci montent à la bibliothèque de leur château, qu’ils lisent la vie de leurs ancêtres, et que ceux-là pensent à leurs prédécesseurs. Malheur aux aristocraties qui éloignent d’elles la pensée ! Si aujourd’hui nous rencontrons parmi les écrivains tant de démagogues, tant de courtisans de la populace, c’est qu’ils ne sentent point dans l’aristocratie l’appui qu’ils auraient le droit d’espérer. Aux grands appartient l’initiative des grandes choses. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 26-27).
. L’homme supérieur, au contraire de la foule, est d’instinct attiré par le travail. Sa vie n’est pas assez longue, son corps pas assez robuste pour la tâche qu’il rêve d’accomplir. Tandis que la foule ne songe qu’au résultat de son labeur, l’intellectuel ne songe qu’au labeur lui-même ; aussi est-il presque toujours incapable, non seulement d’en profiter, mais d’assurer son existence : tout ce qui n’est pas sa pensée devient le jouet des êtres et des choses. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 29).
. Le temps n’est plus de ces nobles princes qui savaient dans la foule reconnaître leur semblable. La démocratie moderne n’admet ni ces faiblesses, ni cette supériorité : Vous êtes tous égaux, répète sa voix brutale. / Si parfois elle affecte de protéger l’art, ce n’est que celui des médiocres. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 31).
. Que pourrions-nous entreprendre avec ces gentilshommes qui ne voient pas d’autre but à donner à leur vie que d’entretenir leur écurie et leur alcôve, avec ces financiers qui amassent l’or sans savoir le dépenser, avec ces artistes qui s’amusent à écrire comme de jeunes demoiselles s’amusent à faire de la tapisserie ? (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 33).
. On écrit, on publie trop : c’est là une des formes de la vanité démocratique. Tous veulent donner leur opinion, sans s’occuper de savoir s’ils en ont réellement une ou s’ils ont le droit de la donner. Dans cette production immense, l’œuvre de la noblesse a toutes les chances de rester inconnue. Les mauvais livres font tort aux bons. À chercher en vain des idées, on se dégoûte de ne rencontrer que des mots vides, des phrases de perroquet, des appels de courtisanes pour avoir de l’or ou de lourdes parades pour obtenir des récompenses. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 34).
. Que l’artiste ait le culte de l’or. Il ne s’agit point de sacrifier sa pensée, mais de l’imposer. Par quelles sorcelleries ? c’est à chacun à le deviner ! Mais il ne faut point dédaigner les richesses ; à défaut de protections princières, la fortune reste le meilleur moyen de dominer les hommes ; que l’artiste cherche donc de toutes ses forces à l’acquérir, en se rappelant qu’elle est pour lui, non un but, mais un instrument. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 36).
. L’ambition de commander aux peuples qui enflamma Lamartine et Hugo ne paraîtra ridicule qu’à des esprits médiocres. Seuls les êtres vulgaires demeurent parqués dans un état : le monde entier appartient aux vastes intelligences. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 36).
. Cherchant à cacher de multiples ambitions, n’apportant aucun idéal, la démocratie pour séduire les majorités, prend le prétexte du bonheur de tous les hommes ; elle s’adresse aux petits intérêts de chacun, à l’instinct du bien-être, au désir de repos, et finalement elle leurre tout le monde, sans que jamais le sentiment d’avoir participé à une grande œuvre vienne compenser chez ses victimes les déceptions qu’elle leur infligea. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 37).
. Les gouvernements absolus, soit en maintenant les peuples dans un état continuel de résistance, soit en s’imposant par la gloire, sont les meilleurs pour assurer à l’homme vraiment fort son complet développement. Quand ils s’établissent, on voit chez tous, non point de petites passions, de petites brigues, mais une vie tendue, active et énergique, pour s’élever jusqu’au prince ou le renverser. Au lieu de cette multitude de coteries qui se dépensent en de vaines querelles, il ne reste plus en présence que deux partis – les conservateurs et leurs adversaires, – dont les batailles, profitables aux uns et aux autres, les forcent à s’observer et les sauvent d’une négligence ou d’un assoupissement funestes. […] De même que les passions violentes inspirent les poètes, de même un régime de toute puissance communique aux hommes une force qu’ils n’eussent point d’abord soupçonnée. La glorification comme l’attaque sont ennoblies. […] On doit même préférer les mesures arbitraires dont [les gouvernements absolus] sont coutumiers au fonctionnement invariable de la machine démocratique, à cette administration effrayante où tout le monde commande, sans que personne ose prendre une décision. / Mais nous avons sur la liberté des idées si fausses que nous éprouvons un sentiment de répulsion à l’idée d’un tel pouvoir et de tout ce qui s’en rapprocherait. Les supercheries du suffrage universel, les changements de ministères, le remplacement des présidents nous intéressent. Nous trouverions pesante la contrainte d’un seul être intelligent et éclairé, qui aurait le souci et l’orgueil des hauts devoirs de la puissance, mais nous acceptons la domination d’une foule barbare, le commandement maladroit et indifférent de l’anonyme. Nous ne faisons même plus attention aux moyens illégaux, ni au caractère tyrannique de certains actes, du moment que nous nous savons vivre sous un régime de liberté. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 37-39).
. Quand on aura compris qu’il n’est pas de plus funeste mensonge que celui de l’égalité des hommes, qu’il n’est pas de société plus misérable que celle où l’on ne reconnaît aucune hiérarchie, quand cette richesse, cette noblesse, cette science qui se dissimulent ou se cachent aujourd’hui prendront conscience de leur valeur et, au lieu de demander pour le compte des autres, se battront pour leur propre cause, je vous assure qu’un nouvel ordre de choses se dessinera. (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 39-40).
. Jugeant que la nature choisit certains êtres pour le pouvoir, nous détestons les gouvernements fondés sur la souveraineté de la populace et n’avons qu’un désir, c’est celui d’effacer de nos mœurs et de nos institutions le souvenir de Quatre-vingt-neuf. / Révolution méprisable ! Ton seul bienfait fut d’augmenter en nous la haine de la bassesse que tu représentes, mais le spectacle des ilotes ivres ne peut être moral qu’à la condition de ne pas durer longtemps. Révolution, maladie de l’humanité ! nous appelons à grands cris le médecin, même brutal, qui purifiera le monde de tes souillures. Ennemie de la Beauté et de la Pensée, puissent nos malédictions être promptement entendues : l’ère des médiocrités est finie, qu’une ère de noblesse recommence ! (Hugues Rebell, Union des trois aristocraties (1894), Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 40).
. Les vieilles religions blessent bien moins l’intelligence que cette religion du progrès qui tend à s’établir parmi nous : les premières ne demandent que la croyance aveugle, la foi ; la religion du progrès exige que la raison se nie elle-même pour la reconnaître ; elle ne veut pas seulement s’imposer à nous, elle prétend nous convaincre. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 44).
. Quand on ne peut s’offrir une monarchie, il faut se contenter de l’anarchie ; je hais les demi-mesures. Cette république qui veut faire par fantaisie de l’autorité, cette république de l’affaire Dreyfus ressemble à un mari qui, après avoir mis sa femme à la porte, retourne, après le divorce, coucher avec elle. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 45).
. Le riche moderne, cette brute qui passe sa vie à parcourir les grand-routes à 80 kilomètres à l’heure, les yeux et l’esprit morts, emporté dans une illusion d’activité, enivré du mouvement de sa machine, comme les fumeurs d’opium sont enivrés de l’intelligence et de la volonté de leur poison, cette brute-là […] ne sera jamais qu’une bête de plus dans le troupeau. […] C’est déjà lui-même une machine qui ne peut plus souffrir. Crachons sur cet homme qui s’est fait volontairement des mains calleuses et des joues sales : prince ou parvenu, il est bien né pour le servage. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 46-47).
. L’idée du progrès n’est qu’une hypothèse inutile et peu raisonnable. Pourquoi le monde deviendrait-il meilleur et qui nous prouve que nous soyons supérieurs à nos ancêtres ? […] Elle devient absurde dès qu’elle est accompagnée des idées de justice et d’égalité. N’est-ce pas, en effet, une suprême injustice, une inégalité révoltante, que les hommes du XXe siècle jouissent d’un état social supérieur à ceux des siècles précédents ? (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 47).
. On peut être à la rigueur humanitaire à vingt ans lorsqu’on ne connaît pas les hommes ; l’être plus tard, c’est tomber ou rester en enfance. [5] (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 48).
. L’affaire Dreyfus n’a pas causé tant de maux sans offrir aux esprits libres une leçon historique qui ne doit pas être perdue. Elle a montré comment se crée une religion, quelle folie un être suspect, médiocre et antipathique, s’il a seulement de l’orgueil et de l’entêtement, peut mettre en jeu, quelles demi-intelligences il peut séduire et comment il arrive même à convertir l’esprit sans défense et le jugement timide. Il est probable qu’il y a environ deux-milles ans l’aventure fut pareille. Nous en gardons encore les traces. La lutte héroïque de Voltaire contre la Bible n’a pas triomphé de cette bêtise plus vivace que tous les préjugés : l’admiration traditionnelle des lettrés et des érudits. […] Pour aimer réellement Voltaire il faut commencer par mettre la Bible au rang des livres de pathologie, parmi les traités des maladies humaines. […] Le mérite de l’Église catholique, c’est d’avoir stérilisé le christianisme, d’avoir profité de son ascendant sur les foules pour les ordonner, les soumettre et les humaniser. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 48-49).
. « Comment ! disent-ils, vous vous plaignez du progrès ! — Que me parlez-vous de progrès ! L’homme est-il plus heureux ! — Je ne sais pas, mais nous faisons nos 80 kilomètres à l’heure. » Avec celà on vous ferme la bouche. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 49).
. Le confort auquel on sacrifie tout aujourdhui n’est que l’idéal d’un homme qui n’a point de sens et est incapable d’avoir des désirs. Les complications et les promiscuités de la vie moderne gâtent toute existence un peu intelligente, sensuelle et délicate. Dans la vie quotidienne comme dans l’État, c’est toujours la brute qui commande. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 49-50).
. Les réactionnaires et les progressistes sont utiles comme les chevaux qui tirent et comme le frein qui retient. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 49-51).
. Une humanité qui ne veut pas être humaine, qui a honte de ses sens et de ses passions, qui veut réformer le monde au lieu de s’accommoder à lui, une humanité qui se vante d’être bâtarde et qui crache sur les ancêtres, fatalement doit arriver aux aberrations actuelles, d’autant plus dangereuses qu’elle n’en a pas conscience, qu’en roulant au plus profond de la boue elle s’imagine voler en plein azur. (Hugues Rebell, « Préjugés modernes », texte paru dans L’Action française, n°35, 1/12/1900 ; repris dans Union des trois aristocraties, Aux dépens des amis de la Revue grise, 1982, p. 49-52).
LÉON DAUDET (1867-1942) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de droite]
JULIEN BENDA (1867-1956) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de gauche]
. M. de Marquet : « Plus nous croyons savoir quelque chose, plus nous ne savons rien ! » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), I ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 20).
. Avocats, criminels et journalistes ne sont point ennemis, les uns ayant besoin de réclame et les autres de renseignements. (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), II ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 22).
. M. Maleine : « [Il] continua […] sur ce ton froid qui est la marque, selon moi, des solides intelligences et des caractères fortement trempés. » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XI ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 75).
. M. Maleine : « Je n’aime point les journalistes. Ce sont des esprits brouillons et entreprenants qu’il faut fuir comme la peste. Cette sorte de gens se croit tout permis et ne respecte rien. Quand on a eu le malheur de leur accorder quoi que ce soit et de se laisser approcher par eux, on est tout-de-suite débordé et il n’est point d’ennuis que l’on ne doive redouter. » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XI ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 77).
. Frédéric Larsan : « Puisqu’il est impossible qu’il en soit autrement, c’est que celà est ! » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XI ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 85).
. Rouletabille : « Les coïncidences sont les pires ennemies de la vérité. » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XII ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 98).
. Rouletabille : « Puisque la chose est mathématiquement possible, pourquoi ne le serait-elle pas humainement !… » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XIV ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 101).
. Rouletabille : « Tout ce que vous offrent les sens ne saurait être une preuve… Moi aussi je me suis penché sur les traces sensibles, mais pour leur demander uniquement d'entrer dans le cercle qu'avait dessiné ma raison. Ah ! bien des fois, le cercle fut si étroit, si étroit… Mais si étroit était-il, il était immense puisqu'il ne contenait que de la vérité !… Oui, oui, je le jure, les traces sensibles n'ont jamais été que mes servantes… Elles n'ont point été mes maîtresses… Elles n'ont point fait de moi cette chose monstrueuse, plus terrible qu'un homme sans yeux : un homme qui voit mal ! » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XVIII ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 119).
. Rouletabille : « Quand on est comme moi à la recherche de la plus mystérieuse vérité, on ne laisse rien échapper, ni de ce que l’on voit, ni de ce que l’on entend. Il faut, à toutes choses, trouver un sens. » (Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune (1907), XIX ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 124).
. Sainclair : « Je le jugeai trop jeune, sans doute parce que je ne l’étais plus assez. » (Gaston Leroux, Le Parfum de la dame en noir (1908), X ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 275).
. Rouletabille : « Il n’y a rien au monde d’incompréhensible, quand on veut un peu se donner la peine de comprendre ! » (Gaston Leroux, Le Parfum de la dame en noir (1908), XVII ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 343).
. La clarté dans laquelle on sait qu’il se passe quelque chose que l’on ne voit pas est plus redoutable que les ténèbres. (Gaston Leroux, Le Parfum de la dame en noir (1908), XVIII ; Bouquins Les Aventures extraordinaires de Rouletabille, tome 1, 1988, p. 345).
. Les hommes de génie ne sauraient se mouvoir dans le cadre de politesse fabriqué pour les hommes ordinaires. (Gaston Leroux, Le Fauteuil hanté (1909), VII ; Bouquins Les Assassins fantômes, 1993, p. 67).
. Hippolyte Patard : « En France on trouve toujours un citoyen de courage et de bon sens pour faire honte, par son exemple, à la foule stupide. » (Gaston Leroux, Le Fauteuil hanté (1909), VII ; Bouquins Les Assassins fantômes, 1993, titre du chapitre p. 73 et réplique p. 75).
. Erik : « Il ne m'a manqué que d'être aimé pour être bon ! » (Gaston Leroux, Le Fantôme de l'Opéra (1910), XXIII ; Bouquins, 1984, p. 168).
. Jacques Cotentin : « Le mensonge est moins dans les choses que l'on nous rapporte et que nous ne comprenons pas que dans nos connaissances ! Les ténèbres nous enveloppent si impitoyablement que, même en tâtonnant, nous bronchons à chaque pas… » (Gaston Leroux, La Poupée sanglante (1923), XX ; Bouquins Aventures incroyables, 1992, p. 445).
. Bénédict Masson : « Ce n’est pas une raison parce qu’on découpe une femme en morceaux et qu’on la met dans son poêle pour qu’on l’ait tuée !… » (Gaston Leroux, La Poupée sanglante (1923), XXI ; Bouquins Aventures incroyables, 1992, p. 454).
. Un malheur présent est égoïste ; il exige tous vos soins, vous courbe sur ses plaies et ne vous permet de regarder autour de vous que lorsque celles-ci commencent à se refermer… (Gaston Leroux, La Poupée sanglante (1923), XXII ; Bouquins Aventures incroyables, 1992, p. 457).
. Le monde est un théâtre, la vie une comédie, souvent un drame, et les hommes des comédiens plus ou moins habiles, sifflés ou applaudis, mais toujours troublés du désir d'attirer sur eux l'attention de leurs contemporains. (Gaston Leroux, La Machine à assassiner (1923), X ; Bouquins Aventures incroyables, 1992, p. 537).
. Jacques : « Hélas !… Ce n'est généralement pas dans leurs raisonnements que les femmes mettent de la distinction… » (Gaston Leroux, La Machine à assassiner (1923), XVII ; Bouquins Aventures incroyables, 1992, p. 584).
ANDRÉ GIDE (1869-1951) : [page spéciale en préparation]
. Naucratès : « Que dirai-je de l’amour ? […] C’est le nom que l’on donne à la douleur pour consoler ceux qui souffrent. Il n’y a que deux manières d'être malheureux : ou désirer ce qu’on n'a pas, ou posséder ce qu’on désirait. L'amour commence par la première et c'est par la seconde qu'il s'achève, dans le cas le plus lamentable, c'est-à-dire dès qu'il réussit. Que les dieux nous sauvent d’aimer ! » (Pierre Louÿs, Aphrodite (1896), II, 2 ; Henri Cyral éditeur, 1929, p. 178).
. Philodème : « Ne pas désirer, mais faire en sorte que l'occasion se présente ; ne pas aimer, mais chérir de loin quelques personnes très choisies pour qui l'on pressent qu'à la longue on pourrait avoir du goût si le hasard et les circonstances faisaient qu'on disposât d'elles ; ne jamais parer une femme des qualités qu'on lui souhaite, ni des beautés dont elle fait mystère, mais présumer le fade pour s'étonner de l'exquis, n'est-ce pas le meilleur conseil qu'un sage puisse donner aux amants ? Ceux-là seuls ont vécu heureux qui ont su ménager parfois dans leur existence si chère l'inappréciable pureté de quelques jouissances imprévues. » (Pierre Louÿs, Aphrodite (1896), II, 2 ; Henri Cyral éditeur, 1929, p. 179).
. Timon : « J'ai souvent remarqué qu'on tient pour aliénés ceux qui hasardent par exception des vérités éclatantes. Les paradoxes trouvent tout le monde d'accord. » (Pierre Louÿs, Aphrodite (1896), II, 2 ; Henri Cyral éditeur, 1929, p. 180).
. Les moralistes ne redoutent jamais de se montrer contradictoires. Ils pensent à bon droit qu’ils ont assez fait en prêchant la bonne parole et que l’exemple personnel n’est pas un adjuvant nécessaire à l’influence de leurs idées. (Pierre Louÿs, Les Aventures du roi Pausole (1901), I, 3 ; Livre de Poche n°124, 1961, p. 24).
. M. Taxis : « Ce qui est élu par la fantaisie est exécrable ; ce qui est conçu par l’autorité est judicieux. Ainsi doit s’exprimer une voix saine, stricte et droite. […] Vous ne savez pas quel est votre bien. L’autorité le sait pour vous et vous le donne à votre insu, malgré vous, c’est là son rôle. […] L'autorité s'exerce. Elle ne défère point. Elle seule discute son droit, limite son domaine et décide de son action. » (Pierre Louÿs, Les Aventures du roi Pausole (1901), I, 5 ; Livre de Poche n°124, 1961, p. 30).
. Ainsi Pausole connaissait l'art d'échapper à tous les regrets en changeant la définition du bonheur sous la dictée des circonstances. (Pierre Louÿs, Les Aventures du roi Pausole (1901), II, 2 ; Livre de Poche n°124, 1961, p. 68).
MARCEL PROUST (1871-1922) : [page spéciale en préparation]
. Claude-Éric de Harmor : « L’art, c’est une maladie triste… On a l’art comme on a la phtisie… C’est un état. Ils ne comprennent pas celà, ceux du public, ils croient à une profession… oui, "profession libérale", je crois… c’est ainsi qu’ils nomment cet esclavage du corps et des songes… » (Camille Mauclair, Le Soleil des morts (1898), I, iii ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 899).
. Manuel Héricourt : « [Nos aînés] continuent à penser que le patriotisme c’est s’enfermer dans une admiration exclusive du terroir. […] Il me paraît qu’une enquête logique sur nos qualités et nos défauts, une comparaison continuelle avec les autres patries, une utilisation des forces du dehors, est d’un patriotisme autrement intelligent. » (Camille Mauclair, Le Soleil des morts (1898), I, iv ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 900-901).
. [L’élite] n’avait même pas à forcer les portes, car il n’y avait pas de portes ; rien, dans cette époque molle, ne menait à rien, le scandale faisait long feu, le cri restait sans écho, l’au-jour-le-jour cheminait passivement vers le dernier jour. (Camille Mauclair, Le Soleil des morts (1898), II, vii ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 938).
. Manuel Héricourt : « Il est clair qu’on attend quelque chose. Mais quoi ? La décomposition totale de la race, ou un renouveau ? L’un et l’autre, je crois. » (Camille Mauclair, Le Soleil des morts (1898), II, viii ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 945).
COLETTE (1873-1954) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
HENRI BARBUSSE (1873-1935) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de gauche]
ALFRED JARRY (1873-1907) : [voir page dévolue aux dramaturges français XIXe-XXe siècles]
JEAN de TINAN (1874-1898)
. Il manquera quelque chose à ceux qui ne se seront pas réveillés dans de petits bouges après des gestes d’amour, la bouche amère et les aines douloureuses, encore assez de tendresses dans le cœur pour qu’il en rejaillisse, tout de même, sur la petite femme qui dort là, assez de catachrèses pour que l’on puisse baiser sa tempe – mais assez de dépit dans l’esprit pour que germent les habitudes d’analyse et de sincérité sans complaisance dont se fait l’insouciance joyeuse que n’émouvront plus que les choses vraiment profondes… (Jean de Tinan, Penses-tu réussir ! (1897), I, iv ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 1059).
. Aristippe était vraiment un sage : il jugeait que la femme n’est qu’un instrument, parfois merveilleux, un moyen d’émotion et non un but – comme l’Art. (Jean de Tinan, Penses-tu réussir ! (1897), III, iii ; dans Romans fin-de-siècle, Bouquins, 1999, p. 1103).
CHARLES-LOUIS PHILIPPE (1874-1909)
. Il avait compris que les travailleurs qui peinent et qui souffrent sont des dupes. Il devint souteneur parce qu’il vivait dans une société pleine de riches qui sont forts et déterminent les vocations. Ils veulent des femmes avec leur argent. Il faut bien qu’il y ait des souteneurs pour leur en donner. (Charles-Louis Philippe, Bubu de Montparnasse (1901), chap. II ; G-F n°303, 1978, p. 81).
. Berthe Méténier : « Tu n’as pas assez de courage pour mériter le bonheur. » (Charles-Louis Philippe, Bubu de Montparnasse (1901), chap. X ; G-F n°303, 1978, p. 192).
LUCIE DELARUE-MARDRUS (1874-1945) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
ALPHONSE de CHÂTEAUBRIANT (1877-1951) : [voir page en préparation dévolue aux penseurs et écrivains de droite]
. Huit jours de mer. Navigation dite « heureuse ». Plate, tiède, sans vent, sans mer, sans rien. Ces immensités pacifiques sont vraiment atones parfois. […] Moi je trouve la pleine mer peu emballante, nauséeuse et bête. Ce que le large a de plus intéressant, ce sont les terres qui surgissent du cercle strict de l'horizon. (Victor Segalen, Journal des îles, 12 avril 1903 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 419).
. Ne choisis jamais un extrême ou un autre ; cette qualité-ci plutôt que celle-là, mais bien l’une et l’autre, à condition même qu’elles se suivent en des oppositions dont tu sois le maître. Alors seulement tu pourras te réjouir de la seule qualité qui ne déçoive pas, l’alternance, et en savourer la possession certaine. (Victor Segalen, Briques et tuiles, 3 décembre 1909 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 899).
. L’isolement est une grande et terrible chose. Il détend et renforce. Mais déverse-le parfois jusqu’à la foule et noie-le dans le grouillis. […] Ne méprise aucun de ces adversaires [=les roches et les dalles, la montagne et la plaine] : sache que de leurs combats brutaux naît une grande douceur. Garde d’en élire aucun pour asile durable, surtout ne les mêle jamais ; n’atténue point la gloire de leurs antinomies : mais, la cultivant en toi-même, sache l’exaspérer et la faire magiquement surgir autour de toi. C’est ainsi que […] tu parviendras – non point, horreur, à la paix et béatitude éternelles – mais à la guerre, aux chocs et aux remous pleins d’ivresse de l’innombrable Diversité. (Victor Segalen, Briques et tuiles, 3 décembre 1909 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 899-900).
. Point de révolte : honorons les âges dans leurs chutes successives et le temps dans sa voracité. (Victor Segalen, Stèles (1912), 9. « Aux dix-milles années » ; Bouquins, tome II, 1995, p. 53).
. Jarignoux : « Je prétends qu’on ne peut traiter avec les Chinois qu’à la chinoise. » (Victor Segalen, René Leys (1914), 9 mai 1911 ; Bouquins, tome II, 1995, p. 462).
. Même les anthropophages respectent leurs hôtes ou les cuisinent avant de les dévorer… (Victor Segalen, René Leys (1914), 18 novembre 1911 ; Bouquins, tome II, 1995, p. 564).
. Ne croyez pas que les mots que j’ai dits contiennent tout ce que Lumière et Joie dessinent dans le lieu du monde […]. / Tant de choses, entr'aperçues, ne pourront jamais être vues. (Victor Segalen, Peintures (1916), III. « Peintures dynastiques » ; Bouquins, tome II, 1995, p. 214).
. Vous savez bien que l’amour, même paternel, est une entrave, et qu’un descendant prolonge seulement l’ignorance et la douleur de vivre. […] La femme surtout est le fardeau, l’arrêt, l’obstacle à la Grande Délivrance. (Victor Segalen, Peintures (1916), III, 8. « Extase funeste de Tsin » ; Bouquins, tome II, 1995, p. 232).
. Mais comment donc rénover, comment restaurer l'ordre sans tout d'abord instaurer le désordre ? Comment s’éprendre de la justice et exciter les beaux exploits pour elle si l’Injuste de temps à autre ne règne en dansant sur le monde ? (Victor Segalen, Peintures (1916), excipit ; Bouquins, tome II, 1995, p. 254).
. Et ceci [= un certain mépris à l’égard du « bétail humain de portage »], tiré de l’expérience, est discrètement à opposer aux plus nobles et plus purs enseignements humanitaires : il est bon de murmurer, comme une leçon d’irréel, les doux cantiques de l’égalité humaine, d’une fraternité qui excuse et blanchit tout, jusqu’au noir, et de droits si éternels qu’ils eurent besoin d’une date, quatre-vingt-neuf, pour être promulgués dans notre temps. (Victor Segalen, Équipée (1915), 17 ; Bouquins, tome II, 1995, p. 297-298).
. L'exotisme est tout ce qui est Autre. Jouir de lui est apprendre à déguster le Divers. (Victor Segalen, Équipée (1915), 28 ; Bouquins, tome II, 1995, p. 318).
. Je ne m’attarde pas à exposer les origines [de Paul Gauguin] ; tout homme exceptionnel étant destiné à décevoir ses parents plus qu’à les prolonger. (Victor Segalen, Hommage à Gauguin (1916), I ; Bouquins, tome I, 1995, p. 349).
. L’exotisme n’est donc pas une adaptation, n’est donc pas la compréhension parfaite d’un hors soi-même qu’on étreindrait en soi, mais la perception aigüe et immédiate d’une incompréhensibilité éternelle. / Partons donc de cet aveu d’impénétrabilité. Ne nous flattons pas d’assimiler les mœurs, les races, les nations, les autres ; mais au contraire réjouissons-nous de ne le pouvoir jamais ; nous réservant ainsi la perdurabilité du plaisir de sentir le Divers. (Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, 11 décembre 1908 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 751).
. Il existe une curieuse opposition entre le sentiment de la Nature et la Vie dans la Nature. On ne voit, on ne sent, on ne déguste la nature avec une grande joie esthétique, que lorsqu’on s’en est un peu séparé, différencié. (Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, janvier 1909 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 755-756).
. Alors peut venir le Royaume du Tiède ; ce moment de bouillie visqueuse sans inégalités, sans chutes, sans ressauts, figuré d’avance grossièrement par la dégradation du divers ethnographique. (Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, 6 mai 1913 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 772).
. Le Divers décroît. Là est le grand danger terrestre. C'est donc contre cette déchéance qu'il faut lutter, se battre, – mourir peut-être avec beauté. (Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, 21 avril 1917 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 775).
. Remède à la Dégradation du taux d’exotisme : exalter les valeurs exotiques partielles qui demeurent. La femme (condamnation absolue du féminisme, sorte de monstrueuse inversion sociale). Exalter le prodigieux profond passé inconnu. (Recherches dans le Temps des Âges.) Ne regarder qu’avec prudence et ironie l’avenir. L’avenir est-il exotique ??? (Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, 21 avril 1917 ; Bouquins, tome I, 1995, p. 776).
. Il faut délibérément supprimer toute la Chine dite moderne, nouvelle et républicaine. Franchement, ce n'est point de parti pris que je la hais, mais d'essence et de non-sens. – C’est la Singerie même, le Bovarysme piteux, la mesquinerie, la couardise, la lâcheté de toute nature, l’ennui, l’ennui surtout. (Victor Segalen, lettre à Henry Manceron, 29 mars 1912 ; dans V. Segalen et H. Manceron, Trahison fidèle. Correspondance 1907-1918, Seuil, 1985, p. 120).
CHARLES-FERDINAND RAMUZ (1878-1947) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
GUILLAUME APOLLINAIRE (1880-1918) : [voir page en préparation dévolue aux poètes français modernes]
ROGER MARTIN du GARD (1881-1958) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
VALÉRY LARBAUD (1881-1957)
. Ne rien trouver ridicule est le signe de l'intelligence complète. (Valéry Larbaud, A. O. Barnabooth (1913), III. Journal intime, 16 juin ; Pléiade, 1958, p. 208).
. Dès que la volonté faiblit, l’habitude reprend des forces. C’est ainsi qu’un fils est tout surpris de pleurer aux funérailles d’un père qui l’a longtemps tyrannisé, qui a tout fait pour que ce fils dût rire un jour de sa mort : la rupture d’une longue habitude, jointe à la faiblesse physique de ces moments-là… On croit pardonner ; on va jusqu'à se féliciter de sa propre grandeur d'âme ; et ce n'est que faiblesse. (Valéry Larbaud, Amants, heureux amants… (1923), III. « Mon plus secret conseil… », XXI ; Pléiade, 1958, p. 714).
. Je n’ai point craint l’expression crue, à condition qu’elle fût savoureuse, ni le geste leste, pourvu qu’il fût épique. (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), préface ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 9).
. Têtard : « [Les femmes] sont donc folles à ce moment-là ? [=quand elles sont enceintes] » — « Elles le sont pendant, avant et après, à ce qui paraît. » — « Toujours est-il que c’est mon père qui dit comme ça, et pour quant à y croire, j’y crois, on ne peut rien faire sans qu’elles ne gueulent comme des poules qu’on plumerait tout vif et pour des choses de rien elles vous foutent des mornifles. » — « Oui, c’est vrai, les femmes c’est de la sale engeance ! » (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), I, 6 ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 68-69).
. « C’est tous des fripouilles et des voleurs, les commerçants », trancha […] Lebrac, qui semblait avoir, avec des idées générales, une certaine expérience de la vie. (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), II, 3 ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 124).
. Allez donc bâtir des théories sur la prétendue expérience des faits quand les véritables causes, les mobiles profonds vous sont aussi cachés que la face d’Isis sous son voile de pierre. (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), III, 2 ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 198).
. Lebrac : « Vous voyez bien que vous n’êtes pas si bêtes que vous croyiez, hein ! Il suffit de vouloir, on trouve toujours. Mais il ne faut pas être une nouille, pardine, sans quoi on est toujours roulé dans la vie du monde. » (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), III, 3 ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 204).
. La Crique : « Dire que, quand nous serons grands, nous serons peut-être aussi bêtes qu'eux ! » (Louis Pergaud, La Guerre des boutons (1912), III, 10, excipit ; Livre de poche n°32371, 2011, p. 284).
. La pédagogie que j’ai pratiquée après l’avoir subie est sans doute une fort belle science, mais je n’en connais guère de plus vaine, de plus creuse et de plus inutile. Toutes les méthodes sont, permettez-moi le mot, de la f…ichaise ; je veux dire qu’avec un élève intelligent elles sont toutes bonnes et avec un croûton elles sont toutes mauvaises… jusqu’à ce qu’on ait trouvé la bonne. (Louis Pergaud, « Les petits gars des champs » (conférence prononcée le 18 février 1914) ; dans La Guerre des boutons, Livre de poche n°32371, 2011, p. 289).
PIERRE MAC ORLAN (1882-1970) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
JEAN GIRAUDOUX (1882-1944) : Voir page spéciale
ANDRÉ BILLY (1882-1971) : Voir page dévolue aux romanciers français de la première moitié du XXe siècle
. Labastière : « J’estime nécessaire […] qu’il y ait dans le monde un certain nombre d’hommes qui s’appellent soldats et qui mettent leur idéal dans le fait de se battre, qui aient le goût de la bataille, non de la victoire, mais de la lutte, comme les chasseurs ont le goût de la chasse, non du gibier. » (Ernest Psichari, L’Appel des armes (1913), II, vii ; éd. Louis Conard, 1937, p. 200 ; ou Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome II, p. 113).
. Servat : « Le danger, c’est d’oublier l’histoire. C’est une culture qui se perd, comme tant d’autres. Et c’est pourtant la connaissance des destinées antérieures de nos races qui nous apprend à vivre dans le présent et à nous élever au-dessus des contingences de l’action sociale. » (Ernest Psichari, L’Appel des armes (1913), II, viii ; éd. Louis Conard, 1937, p. 223 ; ou Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome II, p. 126). [6]
. La passion guerrière nous enrichit, mais aussi elle réveille en nous d'autres instincts, elle nous rend insatiables, nous fait désirer de nouvelles richesses spirituelles. Dès que l'on fait un pas hors de la médiocrité, l'on est sauvé, l'on est assuré de ne plus s'arrêter dans la voie du perfectionnement intérieur, où l'on s'est imprudemment engagé. Celui qui est assoiffé d'héroïsme devient vite assoiffé de divin. Il est embarqué dans l'absolu, qu'il soit terrestre ou qu'il soit céleste, et il ne peut plus que se soumettre humblement à tout ce qui est impérissable dans le monde. (Ernest Psichari, Les Voix qui crient dans le désert (1912), IX ; Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome II, p. 272).
. L’âme inquiète : « Je suis ce poisson qui se gouverne habilement dans l’élément de l’eau et qui pourtant jamais ne connaîtra la mer, faute de la pouvoir contempler du rivage. Je ne défaillirais pas, si je n’avais la hantise de l’harmonie totale et ne voulais dominer l’élément où se meut le corps que je supporte. » (Ernest Psichari, Le Voyage du centurion (1914), I, iii ; éd. Louis Conard, 1942, p. 90-91 ; ou Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome III, p. 45).
. L’intelligence qui s’est asservie au mensonge a porté sa propre condamnation. […] Il y a moins loin de l'ignorance à la science que de la fausse science à la vraie science. (Ernest Psichari, Le Voyage du centurion (1914), I, iii ; éd. Louis Conard, 1942, p. 91 ; ou Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome III, p. 45).
. Ce qui importe avant tout, c’est de démolir toute cette racaille intellectuelle, ces tristes savants : mentalité d’instituteurs primaires, ces politiciens aussi insouciants du salut de la France qu’ignorants de ses vraies destinées, tout cette clique de barbares, romanciers d’adultères, mondains pourris, francs-maçons, radicaux-socialistes, qui donnent à notre époque cet aspect de confusion anarchique si frappant pour peu que l’on ait, comme moi, l’éloignement de la distance. […] Après […] nous aurons retrouvé notre cœur enlisé dans la vase du monde moderne […]. (Ernest Psichari, lettre à Jacques Maritain, 15 juin 1912, dans Lettres du centurion ; éd. Louis Conard, 1933, p. 181 ; ou Œuvres complètes, L. Conard / J. Lambert, 1948, tome III, p. 225-226).
. Il est curieux de se dire qu’à bien regarder ma façon d’aimer et de vouloir être aimé, le mariage est une chose impossible et pourtant la seule solution. (Alain-Fournier, lettre à Jacques Rivière, 28 septembre 1910 ; dans Jacques Rivière / Alain-Fournier, Correspondance 1904-1914, tome II. 1907-1914, Gallimard, 1991, p. 413).
. Le bonheur est une chose terrible à supporter – surtout lorsque ce bonheur n'est pas celui pour quoi on avait arrangé toute sa vie. (Alain-Fournier, lettre à Jacques Rivière, 12 juillet 1913 ; dans Jacques Rivière / Alain-Fournier, Correspondance 1904-1914, tome II. 1907-1914, Gallimard, 1991, p. 509).
. Augustin Meaulnes : « Un homme qui a fait une fois un bond dans le paradis, comment pourrait-il s'accommoder ensuite de la vie de tout le monde ? Ce qui est le bonheur des autres m’a paru dérision. Et lorsque sincèrement, délibérément, j’ai décidé un jour de faire comme les autres, ce jour-là j’ai amassé du remords pour longtemps… » (Alain-Fournier, Le Grand Meaulnes (1913), III, 4 ; Livre de poche n°1000, 1966, p. 170).
. Valentine Blondeau : « Ce qui me plaît en vous, […] ce sont mes souvenirs. » (Alain-Fournier, Le Grand Meaulnes (1913), III, 14 ; Livre de poche n°1000, 1966, p. 229).
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[1] D’autant que j’ai aussi tenu compte de l’équilibre des pages. Par exemple, j’avais mis au départ les citations d’Émile Zola et d’Octave Mirbeau dans la page [à paraître] des penseurs et écrivains de gauche. Puis, à partir du moment où j’ai créé celle-ci, qui avait une taille fort réduite, j’ai décidé de les y transférer, afin de soulager la page des auteurs de gauche, qui sera sans doute, à terme, beaucoup plus volumineuse. Enfin, quand cette page a commencé à gonfler, notamment en raison du poids de ces deux auteurs, j’ai décidé de les en retirer et de leur consacrer deux pages spéciales, l’une pour Zola tout seul, l’autre pour Mirbeau accompagné par Vallès et Darien. Je ne sais pas encore si la page des auteurs de gauche conservera les citations de Roger Vailland, que j’y ai exportées afin de soulager la page consacrée aux romanciers de la seconde moitié du XXe siècle : là encore, je finirai sans doute par les mettre dans la moins chargée, afin de tendre vers un équilibre général.
[2] Péladan attribue curieusement cette « parole » à Massillon. Peut-être pensait-il à ceci : « Les saints ont toujours passé pour gens singuliers : nous sommes devenus, disait autrefois saint Paul, un spectacle aux anges et aux hommes : la vie commune ne saurait être une vie chrétienne ; et l'on se damne à coup sûr, quand on ne veut se sauver qu'avec la multitude, parce que la multitude ne connaît et ne fréquente que cette voie large et spacieuse, qui mène à la perdition » (Sermon pour la fête de la visitation de la sainte Vierge, dans Œuvres, Firmin Didot, 1843, tome II, p. 77).
[3] La première édition porte : « Le hasard sait toujours trouver ceux qui savent s'en servir » (éd. P. Ollendorf, 1909, p. 180).
[4] Cette collecte de citations d’Hugues Rebell est pour l’instant limitée à une brochure. Quand j’en aurai rassemblé une gerbe complémentaire dans Les Chants de la pluie et du soleil, dans Les Chants de la patrie et de l’exil, dans le recueil d’articles De mon balcon et dans sa petite dizaine de romans, je lui consacrerai une page spécifique. Il n’est pas impossible que les collectes de Huysmans et de Péladan se mettent aussi à enfler jusqu'à justifier la création de deux pages autonomes.
[5] Cette idée était déjà répandue depuis plus de vingt-cinq ans quand Rebell l’a reformulée à son tour : « M. Batbie, dans une lettre trop célèbre, citait un jour, pour expliquer ses variations personnelles et bizarres, ce paradoxe de Burke : " Celui qui n’est pas républicain à vingt ans fait douter de la générosité de son âme; mais celui qui, après trente ans, persévère, fait douter de la rectitude de son esprit. "» (Jules Claretie, Portraits contemporains, tome premier, Librairie illustrée, 1875, chap. IV, p. 55). L’erreur vient-elle d’Anselme Batbie (1828-1887) ou de Jules Claretie (1840-1913) ? On n’a pas retrouvé cette idée dans les œuvres d’Edmund Burke.
[6] Le destinataire de cette parole se la répète quelques pages plus loin, où elle devient l’excipit du chapitre : p. 227 de l’édition 1937 ou p. 128 du tome II des Œuvres complètes.
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