LES MEILLEURS APHORISMES DES DRAMATURGES CLASSIQUES : CORNEILLE, MOLIÈRE, RACINE ET LES AUTRES (18.12.2014)
Le théâtre classique est moral aux deux sens du terme : il s’appuie sur l’observation des mœurs et il délivre une leçon moralisatrice. Aussi est-il inévitable qu’il contienne des maximes en abondance, soit pour résumer un trait général du comportement humain, soit pour formuler un précepte que le spectateur pourra appliquer avec profit [1]. C’est particulièrement frappant chez Corneille, dont l’esprit et le style montrent une forte propension aux maximes bien frappées, mais on en trouve aussi chez ses pairs. En voici une première moisson, appelée à être largement complétée dans les années à venir (y compris pour Corneille).
Les auteurs ici présents sont, par ordre alphabétique : P.-L. de BELLOY (4) ; Marie-Joseph CHÉNIER (21) ; Pierre CORNEILLE (81) ; Thomas CORNEILLE (2) ; CRÉBILLON père (4) ; CYRANO DE BERGERAC (3) ; DESTOUCHES (3) ; Jean-François DUCIS (1) ; Robert GARNIER (7) ; Jean-Baptiste GRESSET (5) ; Népomucène LEMERCIER (7) ; MOLIÈRE (38) ; Jean RACINE (28) ; Jean de ROTROU (15) ; VOLTAIRE (9).
. Cornélie : « Ce n’est par lâcheté, ni par faute de cœur, / Qu’on recourt à la mort pour sortir de langueur : / Au contraire celui qui l’appelle, se montre / De courage assuré contre le malencontre. / Quiconque ne frémit aux menaces de mort, / N’est sujet comme un peuple aux injures du sort. / […] Non non, il faut mourir, il faut d’une mort brave / Frauder notre tyran pour ne lui être esclave ». (Robert Garnier, Cornélie (1574), acte II, vers 529-534 et 539-540 ; éd. Les Belles-Lettres, 1973, p. 175).
. Le chœur : « Rien de durable ne séjourne, / Toute chose naît pour périr, / Et tout ce qui périt retourne / Pour une autre fois refleurir. / Les formes des choses ne meurent / Par leurs domestiques discors / Que les matières qui demeurent / Ne refassent un autre corps. » (Robert Garnier, Cornélie (1574), acte II, vers 567-574 ; éd. Les Belles-Lettres, 1973, p. 176).
. Marc-Antoine : « Mais quoi ? Le naturel des femmes est volage, / Et à chaque moment se change leur courage. / Bien fol qui s'y abuse, et qui de loyauté / Pense jamais trouver compagne une beauté. » (Robert Garnier, Marc-Antoine (1578), acte I, vers 145-148 ; éd. Les Belles-Lettres, 1974, p. 21).
. Agamemnon : « La jeunesse ne peut commander à soi-même. / Cet âge toujours porte une fureur extrême. » (Robert Garnier, La Troade (1579), acte III, vers 1397-1398 ; éd. Les Belles-Lettres, 1952, p. 72).
. Beatrix : « Mon dieu, ne laissez pas écouler, nonchalante, / Cette félicité que le ciel vous présente ! / L’occasion est chauve, et qui ne la retient, / Tout soudain elle échappe et jamais ne revient. » (Robert Garnier, Bradamante (1582), acte III scène 3, vers 497-500 ; éd. Les Belles-Lettres, 1949, p. 141).
. Amital : « Mais la jeunesse ardente et prompte aux changements, / Toujours mit sous le pied nos admonestements. » (Robert Garnier, Les Juives (1583), acte III scène 2, vers 1045-1046 ; éd. Les Belles-Lettres, 1949, p. 60).
. Mais quelle liberté saurait-on mieux avoir / Qu’alors qu’un Prince humain nous tient en son pouvoir ? / Nommez-vous liberté licence au populaire / De faire impunément tout ce qu'il voudra faire ? Nommez-vous liberté guider nos actions / Par le brutal sentier de nos affections ? (Robert Garnier, Poésies diverses, VI. « Hymne de la monarchie », vers 293-298 ; éd. Les Belles-Lettres, 1949, p. 225).
TRISTAN L’HERMITE (1601-1655)
[à compléter]
JEAN de MAIRET (1604-1686)
[à compléter]
. Aristote ne s’est pas expliqué si clairement dans sa Poétique, que nous n’en puissions faire ainsi que les philosophes, qui le tirent chacun à leur parti dans leurs opinions contraires. (Corneille, Le Cid, avertissement ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 695).
. Si nous ne nous permettions quelque chose de plus ingénieux que le cours ordinaire de la passion, nos poèmes ramperaient souvent, et les grandes douleurs ne mettraient dans la bouche de nos acteurs que des exclamations et des hélas. (Corneille, Le Cid, examen ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 702).
. Tircis : « Et l'hymen de soi-même est un si lourd fardeau / Qu'il faut l'appréhender à l'égal du tombeau. / S'attacher pour jamais au côté d'une femme ! / Perdre pour des enfants le repos de son âme, / Quand leur nombre importun accable la maison ! / Ah ! qu'on aime ce joug avec peu de raison ! » (Corneille, Mélite ou les fausses lettres (1629), I, 1, vers 99-104 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 12).
. Philiste : « Et cela t’affligeait ? Laissons courir le temps / Et malgré les abus vivons toujours contents. / Le monde est un chaos, et son désordre excède / Tout ce qu'on y voudrait apporter de remède. / N’ayons l’œil, cher ami, que sur nos actions. / Aussi bien s’offenser de ses corruptions / À des gens comme nous ce n’est qu’une folie. » (Corneille, La Veuve ou le traître trahi (1632), III, 3, vers 917-923 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 254).
. Dorimant : « Chacun fait ce qu'il peut, et ce n'est pas merveille / Si comme avec bon droit on perd bien un procès. / Souvent un bon ouvrage a de faibles succès : / Le jugement de l’homme, ou plutôt son caprice, / Pour quantité d’esprits n’a que de l’injustice. » (Corneille, La Galerie du Palais ou l’amie rivale (1633), I, 7, vers 178-182 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 313).
. La lingère : « Je ne réplique point à des gens en colère. » (Corneille, La Galerie du Palais ou l’amie rivale (version de 1660), IV, 14, vers 1462 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1309 (variante d de la p. 367)).
. Théante : « Quelles vaines frayeurs troublent ma fantaisie ! / Que l'amour aisément penche à la jalousie ! / Qu'on croit tôt ce qu'on craint en ces perplexités / Où les moindres soupçons passent pour vérités ! » (Corneille, La Suivante (1634), I, 2, vers 105-108 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 396).
. Daphnis : « On néglige aisément un homme qui néglige. » (Corneille, La Suivante (1634), I, 6, vers 245 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 401).
. Amarante : « Qu'aisément un esprit qui se laisse flatter / S'imagine un bonheur qu'il pense mériter ! » (Corneille, La Suivante (1634), III, 5, vers 811-812 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 426).
. Angélique : « Qui veut tout retenir laisse tout échapper. » (Corneille, La Place royale ou l’amoureux extravagant (1634), I, 1, vers 96 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 476).
. Géronte : « Qu’à présent la jeunesse a d’étranges manies ! / Les règles du devoir lui sont des tyrannies, / Et les droits les plus saints deviennent impuissants / À l’empêcher de courre après son propre sens. » (Corneille, L’Illusion comique (1636), III, 2, vers 673-676 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 642).
. Matamore : « Destin, qu’à ma valeur tu te montres contraire ! » (Corneille, L’Illusion comique (1636), III, 7, vers 869 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 650).
. Clindor : « Le temps est précieux, et vous fuyez toujours ! » (Corneille, L’Illusion comique (1636), V, 3, vers 1400 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 675).
. Isabelle : « Puisque mon teint se fane et ma beauté se passe, / Il est bien juste aussi que ton amour se lasse. » (Corneille, L’Illusion comique (1636), V, 3, vers 1521-1522 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 678).
. Clindor : « Par l’effort que je fais à mon amour extrême, / Madame, il faut apprendre à vous vaincre vous-même, / À faire violence à vos plus chers désirs, / Et préférer l’honneur à d’injustes plaisirs, / Dont au moindre soupçon, au moindre vent contraire, / La honte et les malheurs sont la suite ordinaire. » (Corneille, L’Illusion comique (1636), V, 5, vers 1685-1690 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 683).
. Alcandre : « Ainsi de notre espoir la fortune se joue ; / Tout s’élève ou s’abaisse au branle de sa roue, / Et son ordre inégal qui régit l’univers / Au milieu du bonheur a ses plus grands revers. » (Corneille, L’Illusion comique (1636), V, 6, vers 1725-1728 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 685).
. Chimène : « L’excès de ce bonheur me met en défiance, / Puis-je à de tels discours donner quelque croyance ? / […] Un moment donne au sort des visages divers, / Et dans ce grand bonheur je crains un grand revers. » (Corneille, Le Cid (1637), I, 2, vers 39-40 et 49-50 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 710-711).
. Don Diègue : « Mais qui peut vivre infâme est indigne du jour ; / Plus l'offenseur est cher et plus grande est l'offense. » (Corneille, Le Cid (1637), I, 6, vers 286-287 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 720).
. Rodrigue : « Mon mal augmente à le vouloir guérir. » (Corneille, Le Cid (version de 1660), I, 7, vers 327 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1493 (variante d de la p. 721)).
. Don Arias : « Quoi qu’on fasse d’illustre et de considérable, / Jamais à son sujet un Roi n’est redevable : / Vous vous flattez beaucoup, et vous devez savoir / Que qui sert bien son Roi ne fait que son devoir. » (Corneille, Le Cid (1637), II, 1, vers 371-374 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 723).
. Le Comte : « Qui ne craint point la mort ne craint point les menaces. / J'ai le cœur au-dessus des plus fières disgrâces, / Et l'on peut me réduire à vivre sans bonheur, / Mais non pas me résoudre à vivre sans honneur. » (Corneille, Le Cid (version de 1660), II, 1, vers 393-396 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1495-1496 (variante b de la p. 724)).
. Le Comte : « Trop peu d’honneur pour moi suivrait cette victoire : / À vaincre sans péril on triomphe sans gloire. » (Corneille, Le Cid (1637), II, 2, vers 435-436 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 726).
. L’Infante : « Ah ! qu’avec peu d’effet on entend la raison, / Quand le cœur est atteint d’un si charmant poison ! / Alors que le malade aime sa maladie, / Il ne peut plus souffrir que l'on y remédie ! » (Corneille, Le Cid (1637), II, 5, vers 525-528 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 730).
. Le roi : « Ainsi votre raison n’est pas raison pour moi ; / Vous parlez en soldat, je dois agir en Roi. » (Corneille, Le Cid (1637), II, 6, vers 601-602 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 733).
. Don Diègue : « Qu'on est digne d'envie / Lorsqu'en perdant la force on perd aussi la vie, / Et qu’un long âge apprête aux hommes généreux / Au bout de leur carrière un destin malheureux ! » (Corneille, Le Cid (version de 1660), II, 7, vers 697-700 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1499 (variante b de la p. 737)).
. Don Diègue : « Mourant sans déshonneur je mourrai sans regret. » (Corneille, Le Cid (1637), II, 7, vers 742 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 738).
. Rodrigue : « J’ai fait ce que j’ai dû, je fais ce que je dois. » (Corneille, Le Cid (1637), III, 4, vers 910 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 745).
. Don Diègue : « Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse : / Nos plus heureux succès sont mêlés de tristesse ; / Toujours quelques soucis en ces événements / Troublent la pureté de nos contentements. » (Corneille, Le Cid (1637), III, 5, vers 1011-1014 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 749).
. Don Diègue : « Nous n'avons qu'un honneur, il est tant de maîtresses ! / L'amour n'est qu'un plaisir, l'honneur est un devoir. » (Corneille, Le Cid (version de 1660), III, 6, vers 1058-1059 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1495-1496 (variante c de la p. 751)).
. Chimène : « Mourir pour le pays n’est pas un triste sort, / C’est s’immortaliser par une belle mort. » (Corneille, Le Cid (1637), IV, 5, vers 1377-1378 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 761).
. Camille : « Le devoir d'une fille est en l'obéissance. » (Corneille, Horace (1640), I, 3, vers 340 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 855).
. Horace : « Mais quoique ce combat me promette un cercueil, / La gloire de ce choix m’enfle d’un juste orgueil. / […] Rome a trop cru de moi, mais mon âme ravie / Remplira son attente, ou quittera la vie. / Qui veut mourir ou vaincre est vaincu rarement : / Ce noble désespoir périt malaisément. » (Corneille, Horace (1640), II, 1, vers 377-378 et 383-386 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 856).
. Horace : « Quoi ! vous me pleureriez mourant pour mon pays ! / Pour un cœur généreux ce trépas a des charmes : / La gloire qui le suit ne souffre point de larmes, / Et je le recevrais en bénissant mon sort, / Si Rome et tout l’État perdaient moins en ma mort. » (Corneille, Horace (1640), II, 1, vers 398-402 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 857).
. Horace : « Notre malheur est grand, il est au plus haut point, / Je l’envisage entier, mais je n’en frémis point. / Contre qui que ce soit que mon pays m’emploie, / J’accepte aveuglément cette gloire avec joie : / Celle de recevoir de tels commandements / Doit étouffer en nous tous autres sentiments. / Qui, près de le servir, considère autre chose, / À faire ce qu’il doit lâchement se dispose. / Ce droit saint et sacré rompt tout autre lien. / Rome a choisi mon bras, je n’examine rien. » (Corneille, Horace (1640), II, 3, vers 489-498 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 860).
. Horace : « Mourir pour le pays est un si digne sort, / Qu'on briguerait en foule une si belle mort. » (Corneille, Horace (1640), II, 3, vers 441-442 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 859).
. Camille : « Quoi ! tu ne veux pas voir qu’ainsi tu me trahis ! » — Curiace : « Avant que d’être à vous je suis à mon pays. » (Corneille, Horace (1640), II, 5, vers 561-562 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 862).
. Le vieil Horace : « Qu’est-ceci, mes enfants ? Écoutez-vous vos flammes, / Et perdez-vous encor le temps avec des femmes ? / Prêts à verser du sang regardez-vous des pleurs ? / Fuyez, et laissez-les déplorer leurs malheurs. » (Corneille, Horace (1640), II, 7, vers 679-682 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 866).
. Le vieil Horace : « Faites votre devoir, et laissez faire aux dieux. » (Corneille, Horace (1640), II, 8, vers 710 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 867).
. Camille : « Un oracle jamais ne se laisse comprendre, / On l’entend d’autant moins que plus on croit l’entendre, / Et loin de s’assurer sur un pareil arrêt, / Qui n’y voit rien d’obscur doit croire que tout l’est. » (Corneille, Horace (1640), III, 3, vers 851-854 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 872).
. Sabine : « Nous avons en nos mains la fin de nos douleurs, / Et qui veut bien mourir peut braver les malheurs. » (Corneille, Horace (1640), III, 5, vers 937-938 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 875).
. Horace : « Sire, on se défend mal contre l’avis d’un Roi, / Et le plus innocent devient soudain coupable / Quand aux yeux de son Prince il paraît condamnable. / C’est crime qu’envers lui se vouloir excuser ; / Notre sang est son bien, il en peut disposer, / Et c’est à nous de croire, alors qu’il en dispose / Qu’il ne s’en prive point sans une juste cause. » (Corneille, Horace (1640), V, 2, vers 1538-1544 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 895).
. Le vieil Horace : « Horace, ne crois pas que le peuple stupide / Soit le maître absolu d’un renom bien solide. / Sa voix tumultueuse assez souvent fait bruit, / Mais un moment l’élève, un moment le détruit, / Et ce qu’il contribue à notre renommée / Toujours en moins de rien se dissipe en fumée. / C’est aux Rois, c’est aux Grands, c’est aux esprits bien faits, / À voir la vertu pleine en ses moindres effets ; / C’est d’eux seuls qu’on reçoit la véritable gloire, / Eux seuls des vrais Héros assurent la mémoire. » (Corneille, Horace (1640), V, 3, vers 1711-1720 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 899).
. Émilie : « Cessez, vaines frayeurs, cessez, lâches tendresses, / De jeter dans mon cœur vos indignes faiblesses ; / Et toi qui les produis par tes soins superflus, / Amour, sers mon devoir, et ne le combats plus. / Lui céder, c’est ta gloire, et le vaincre, ta honte ; / Montre-toi généreux, souffrant qu’il te surmonte. / Plus tu lui donneras, plus il te va donner, / Et ne triomphera que pour te couronner. » (Corneille, Cinna (1641), I, 1, vers 45-52 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 914).
. Émilie : « De quelques légions qu’Auguste soit gardé, / Quelque soin qu’il se donne, et quelque ordre qu’il tienne, / Qui méprise sa vie est maître de la sienne [2]. / Plus le péril est grand, plus doux en est le fruit : / La vertu nous y jette, et la gloire le suit. » (Corneille, Cinna (1641), I, 2, vers 128-132 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 916-917).
. Émilie : « Meurs, s’il y faut mourir, en citoyen romain, / Et par un beau trépas couronne un beau dessein. » (Corneille, Cinna (1641), I, 4, vers 331-332 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 922).
. Auguste : « L’un m’invite à le suivre, et l’autre me fait peur : / Mais l’exemple souvent n’est qu’un miroir trompeur, / Et l’ordre du Destin qui gêne nos pensées / N’est pas toujours écrit dans les choses passées. / Quelquefois l’un se brise, où l’autre s’est sauvé, / Et par où l’un périt, un autre est conservé. » (Corneille, Cinna (1641), II, 1, vers 387-392 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 924).
. Cinna : « Si l'amour du pays doit ici prévaloir, / C'est son bien seulement que vous devez vouloir, / Et cette liberté qui lui semble si chère, / N'est pour Rome, Seigneur, qu'un bien imaginaire, / Plus nuisible qu'utile, et qui n'approche pas / De celui qu'un bon Prince apporte à ses États. / Avec ordre et raison les honneurs il dispense, / Avec discernement punit et récompense, / Et dispose de tout en juste possesseur, / Sans rien précipiter de peur d'un successeur. / Mais quand le Peuple est maître on n'agit qu'en tumulte, / La voix de la raison jamais ne se consulte, / Les honneurs sont vendus aux plus ambitieux, / L'autorité livrée aux plus séditieux. / Ces petits souverains qu'il fait pour une année, / Voyant d'un temps si court leur puissance bornée, / Des plus heureux desseins font avorter le fruit, / De peur de le laisser à celui qui les suit. / Comme ils ont peu de part au bien dont ils ordonnent, / Dedans le champ du public largement ils moissonnent, / Assurés que chacun leur pardonne aisément, / Espérant à son tour un pareil traitement. / Le pire des États c'est l'État populaire. » (Corneille, Cinna (1641), II, 1, vers 499-521 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 927).
. Maxime : « J’ose dire, Seigneur, que par tous les climats / Ne sont pas bien reçus toutes sortes d’États. / Chaque peuple a le sien conforme à sa nature, / Qu’on ne saurait changer sans lui faire une injure : / Telle est la loi du Ciel dont la sage équité / Sème dans l’univers cette diversité. » (Corneille, Cinna (1641), II, 1, vers 535-540 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 928).
. Cinna : « Ainsi la liberté ne peut plus être utile / Qu’à former les fureurs d’une guerre civile, / Lorsque par un désordre à l’univers fatal / L’un ne veut point de maître, et l’autre point d’égal. / Seigneur, pour sauver Rome il faut qu’elle s’unisse / En la main d’un bon Chef à qui tout obéisse. » (Corneille, Cinna (1641), II, 1, vers 585-590 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 929).
. Auguste : « Qui pardonne aisément invite à l'offenser. » (Corneille, Cinna (1641), IV, 2, vers 1160 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 949).
. Maxime : « Jamais un affranchi n’est qu’un esclave infâme : / Bien qu’il change d’état, il ne change point d’âme. » (Corneille, Cinna (1641), IV, 6, vers 1409-1410 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 958).
. Livie : « Tous ces crimes d’État qu’on fait pour la Couronne, / Le Ciel nous en absout alors qu’il nous la donne ; / Et dans le sacré rang où sa faveur l’a mis, / Le passé devient juste, et l’avenir permis. / Qui peut y parvenir ne peut être coupable : / Quoi qu’il ait fait, ou fasse, il est inviolable. / Nous lui devons nos biens, nos jours sont en sa main, / Et jamais on n’a droit sur ceux du Souverain. » (Corneille, Cinna (1641), V, 2, vers 1609-1616 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 964).
. Néarque : « Rompez ses premiers coups, laissez pleurer Pauline ; / Dieu ne veut point d’un cœur où le monde domine, / Qui regarde en arrière, et douteux en son choix, / Lorsque sa voix l’appelle, écoute une autre voix. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), I, 1, vers 65-68 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 985).
. Stratonice : « À raconter ses maux souvent on les soulage. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), I, 3, vers 161 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 989).
. Pauline : « Une femme d’honneur peut avouer sans honte / Ces surprises des sens que la raison surmonte ; / Ce n’est qu’en ces assauts qu’éclate la vertu, / Et l’on doute d’un cœur qui n’a point combattu. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), I, 3, vers 165-168 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 989).
. Néarque : « Qui n'appréhende rien présume trop de soi. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), II, 6, vers 680 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1009).
. Stratonice : « C’est l’ennemi commun de l’État et des Dieux, / Un méchant, un infâme, un rebelle, un perfide, / Un traître, un scélérat, un lâche, un parricide, / Une peste exécrable à tous les gens de bien, / Un sacrilège impie, en un mot un chrétien. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), III, 2, vers 780-784 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1013).
. Pauline : « Mais il est aveuglé. » — Félix : « Mais il se plaît à l’être. / Qui chérit son erreur ne la veut pas connaître. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), III, 3, vers 913-914 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1018).
. Félix : « Je regarde sa faute, et ne vois plus son rang. / Quand le crime d’État se mêle au sacrilège, / Le sang ni l’amitié n’ont plus de privilège. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), III, 3, vers 924-926 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1019).
. Félix : « Et plus l’exemple est grand, plus il est dangereux. / On ne distingue point quand l’offense est publique, / Et lorsqu’on dissimule un crime domestique, / Par quelle autorité peut-on, par quelle loi, / Châtier en autrui ce qu’on souffre chez soi ? » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), III, 5, vers 1024-1026 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1023).
. Pauline : « Je sais que c’est beaucoup que ce que je demande, / Mais plus l’effort est grand, plus la gloire en est grande. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), IV, 5, vers 1355-1356 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1034).
. Sévère : « Je suis encor Sévère, et tout ce grand pouvoir / Ne peut rien sur ma gloire, et rien sur mon devoir. / Ici l’honneur m’oblige, et j’y veux satisfaire ; / Qu’après, le Sort se montre ou propice ou contraire, / Comme son naturel est toujours inconstant, / Périssant glorieux, je périrai content. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), IV, 6, vers 1405-1410 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1036).
. Sévère : « Peut-être qu’après tout ces croyances publiques / Ne sont qu’inventions de sages politiques, / Pour contenir un peuple ou bien pour l’émouvoir, / Et dessus sa faiblesse affermir leur pouvoir. » (Corneille, Polyeucte martyr (1642), IV, 6 ; Pléiade Couton tome I, 1980, p. 1676 (variante a de la p. 1037)).
. Cliton : « Tel donne à pleines mains qui n’oblige personne : / La façon de donner vaut mieux que ce qu’on donne. » (Corneille, Le Menteur (1644), I, 1, vers 89-90 ; Pléiade Couton tome II, 1984, p. 12).
. Cliton : « Monsieur, quand une femme a le don de se taire, / Elle a des qualités au-dessus du vulgaire. / C’est un effort du Ciel qu’on a peine à trouver : / Sans un petit miracle il ne peut l’achever, / Et la Nature souffre extrême violence, / Lorsqu’il en fait d’humeur à garder le silence. » (Corneille, Le Menteur (1644), I, 4, vers 209-214 ; Pléiade Couton tome II, 1984, p. 17).
. Sertorius : « On a peine à haïr ce qu’on a bien aimé, / Et le feu mal éteint est bientôt rallumé. » (Corneille, Sertorius (1662), I, 3, vers 263-264 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 321).
. Viriate : « Le temps est un grand maître, il règle bien des choses. » (Corneille, Sertorius (1662), II, 4, vers 717 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 335).
. Tite : « Un monarque a souvent des lois à s’imposer, / Et qui veut pouvoir tout ne doit pas tout oser. » (Corneille, Tite et Bérénice (1670), IV, 5, vers 1341-1342 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1037).
. Tite : « La vie est peu de chose, et tôt ou tard, qu’importe / Qu’un traître me l’arrache, ou que l’âge l’emporte ? / Nous mourons à toute heure, et dans le plus doux sort / Chaque instant de la vie est un pas vers la mort. » (Corneille, Tite et Bérénice (1670), V, 1, vers 1483-1486 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1043).
. Ormène : « Votre douleur, Madame, est trop ingénieuse. » — Eurydice : « Quand on a commencé de se voir malheureuse, / Rien ne s’offre à nos yeux qui ne fasse trembler, / La plus fausse apparence a droit de nous troubler, / Et tout ce qu’on prévoit, tout ce qu’on s’imagine, / Forme un nouveau poison pour une âme chagrine. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), I, 1, vers 109-114 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1246).
. Suréna : « Que tout meure avec moi, Madame. Que m'importe / Qui foule après ma mort la terre qui me porte ? / Sentiront-ils percer par un éclat nouveau, / Ces illustres aïeux, la nuit de leur tombeau ? Respireront-ils l'air où les feront revivre / Ces neveux qui peut-être auront peine à les suivre, / Peut-être ne feront que les déshonorer, / Et n'en auront le sang que pour dégénérer ? / Quand nous avons perdu le jour qui nous éclaire, / Cette sorte de vie est bien imaginaire, / Et le moindre moment d'un bonheur souhaité / Vaut mieux qu'une si froide, et vaine éternité. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), I, 3, vers 301-312 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1254).
. Palmis : « Je sais ce qu’à l’État ceux de votre naissance, / Tout maîtres qu’ils en sont, doivent d’obéissance : / Son intérêt chez eux l’emporte sur le leur, / Et du moment qu’il parle, il fait taire le cœur. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), II, 3, vers 609-612 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1265).
. Orode : « Il n’est rien d’impossible à la valeur d’un homme / Qui rétablit son maître, et triomphe de Rome ; / Mais sous le ciel tout change, et les plus valeureux / N’ont jamais sûreté d’être toujours heureux. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), III, 2, vers 849-852 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1273).
. Orode : « C’est bien traiter les Rois en personnes communes / Qu’attacher à leur rang ces gênes importunes, / Comme si pour vous plaire, et les inquiéter, / Dans le trône avec eux l’amour pouvait monter. / […] Du reste, en ces grands nœuds l’État qui s’intéresse / Ferme l’œil aux attraits, et l’âme à la tendresse. / La seule politique est ce qui nous émeut, / On la suit, et l’amour s’y mêle comme il peut : / S’il vient, on l’applaudit, s’il manque, on s’en console. / C’est dont vous pouvez croire un Roi sur sa parole : / Nous ne sommes point faits pour devenir jaloux, / Ni pour être en souci, si le cœur est à nous. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), III, 3, vers 1025-1028 et 1033-1040 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1279).
. Pacorus : « Un amant peut se taire, / Mais d’un sujet au Roi, c’est crime qu’un mystère. / Qui connaît un obstacle au bonheur de l’État, / Tant qu’il le tient caché, commet un attentat. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), IV, 3, vers 1174-1176 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1284-1285).
. Pacorus : « L’amour dans sa prudence est toujours indiscret : / À force de se taire il trahit son secret, / Le soin de le cacher découvre ce qu’il cache, / Et son silence dit tout ce qu’il craint qu’on sache. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), IV, 4, vers 1275-1278 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1288).
. Suréna : « Qu’on veuille mon épée ou qu’on veuille ma tête, / Dites un mot, Seigneur, et l’une et l’autre est prête : / Je n’ai goutte de sang qui ne soit à mon Roi ». (Corneille, Suréna, général des Parthes, IV, 4, vers 1253-1255 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1290).
. Eurydice : « Le devoir vient à bout de l’amour le plus ferme : / Les grands cœurs ont vers lui des retours éclatants, / Et quand on veut se vaincre, il y faut peu de temps. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), V, 1, vers 1418-1420 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1292).
. Suréna : « Jamais un envieux ne pardonne au mérite. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), V, 2, vers 1530 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1296).
. Suréna : « La tendresse n’est point de l’amour d’un Héros, / Il est honteux pour lui d’écouter des sanglots, / Et parmi la douceur des plus illustres flammes, / Un peu de dureté sied bien aux grandes âmes. » (Corneille, Suréna, général des Parthes (1674), V, 3, vers 1675-1678 ; Pléiade Couton tome III, 1987, p. 1301).
. Pour maxime infaillible imprime en ta pensée / Que chaque instant de vie est un pas vers la mort, / Et qu’il faut de ton âme appliquer tout l’effort / À goûter chaque jour une mort avancée. (Corneille, L’Imitation de Jésus-Christ (1653), II, 12, vers 1657-1660 ; Pléiade Couton tome II, 1984, p. 928).
. Floris : « Un visage commun s'embellit par le fard ; / Un beau n'a point besoin des ornements de l'art. » (Jean de Rotrou, L'Heureuse constance (1631), I, 3, vers 115-116 ; dans Œuvres, tome I, Th. Desoer, 1820, p. 440).
. Laure : « L'Amour engendre en nous cette délicatesse, / Que ce que nous aimons, s'il ne nous rit, nous blesse. / Un regard un peu froid échappé sans dessein / Nous est un trait mortel, qui nous perce le sein. » (Jean de Rotrou, Laure persécutée (1637), I, 2, vers 113-116 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 871).
. Antigone : « Vos raisons, comme vous, sont de si peu de force, / Que, loin de m'arrêter, cet obstacle m'amorce. / Laissez indifférent mon bon ou mauvais sort ; / Voyez, si je péris, mon naufrage du port ; / Pour moi je tiens plus chère et plus digne d’envie / Une honorable mort qu’une honteuse vie ; / Et de mes ans enfin voir terminer le cours / Ne sera qu’arriver où je vais tous les jours. » (Jean de Rotrou, Antigone (1638), III, 5 ; dans Œuvres, tome IV, Th. Desoer, 1820, p. 46).
. Bélisaire : « On ôte du mérite aux bienfaits qu'on retarde. » (Jean de Rotrou, Bélisaire (1643), II, 6 ; dans Œuvres, tome IV, Th. Desoer, 1820, p. 490).
. Genest : « Nos jours n’ont pas une heure sûre, / Chaque instant use leur flambeau, / Chaque pas nous mène au tombeau. / Et l’Art, imitant la Nature, / Bâtit d’une même figure / Notre bière et notre berceau. » (Jean de Rotrou, Le Véritable saint Genest (1646), V, 1, vers 1455-1460 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 995).
. Marcelle : « Mais peut-on qu’en souffrant vaincre un mal sans remède ? / Qui se sait modérer, s’il veut, tout lui succède [=lui réussit] ; / Pour obtenir nos fins, n’aspirons point si haut ; / À qui le désir manque, aucun bien ne défaut. » (Jean de Rotrou, Le Véritable saint Genest (1646), V, 2, vers 1531-1534 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 997).
. Genest : « Se plaindre de mourir, c’est se plaindre d’être homme ; / Chaque jour le détruit, chaque instant le consomme ; / Au moment qu’il arrive, il part pour le retour, / Et commence de perdre en recevant le jour. » (Jean de Rotrou, Le Véritable saint Genest (1646), V, 2, vers 1611-1614 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1000).
. Don Pèdre : « En ne réprimant pas cette témérité, / J’admets des attentats sur mon autorité : / L'offense négligée à la fin devient nôtre ; / Qui souffre une licence en autorise une autre ; / Et qui peut sur ses vœux permettre un attentat, / À la même insolence expose son état. » (Jean de Rotrou, Don Bernard de Cabrère (1647), III, 5 ; dans Œuvres, tome V, Th. Desoer, 1820, p. 132-133).
. Don Bernard : « Nul bien n’est immortel qu’après que nous le sommes ; / L’homme est mal assuré quand il se fie aux hommes. / Ce qu’on gagne bientôt se peut perdre dans peu ; / Tout dépend du hasard, et la vie est un jeu. » (Jean de Rotrou, Don Bernard de Cabrère (1647), III, 7 ; dans Œuvres, tome V, Th. Desoer, 1820, p. 137).
. Léonor : « Se posséder soi-même est le plus grand des biens. » (Jean de Rotrou, Don Bernard de Cabrère (1647), IV, 1 ; dans Œuvres, tome V, Th. Desoer, 1820, p. 141).
. Venceslas : « Un roi vous semble heureux, et sa condition / Est douce au sentiment de votre ambition ; / Il dispose à son gré des fortunes humaines ; / Mais, comme les douceurs, en savez-vous les peines ? / À quelque heureuse fin que tendent ses projets, / Jamais il ne fait bien au gré de ses sujets : / Il passe pour cruel, s'il garde la justice ; / S'il est doux, pour timide et partisan du vice ; / S'il se porte à la guerre, il fait des malheureux ; / S'il entretient la paix, il n'est pas généreux ; / S'il pardonne, il est mol ; s'il se venge, barbare ; / S'il donne, il est prodigue ; et s'il épargne, avare. / Ses desseins les plus purs et les plus innocents / Toujours en quelque esprit jettent un mauvais sens, / Et jamais sa vertu, tant soit-elle connue, / En l'estime des siens ne passe toute nue. / Si donc pour mériter de régir ses États, / La plus pure vertu, même, ne suffit pas, / Par quel heur voulez-vous que le règne succède, / À des esprits oisifs que le vice possède, / Lors de leurs voluptés incapables d'agir, / Et qui serfs de leurs sens ne se sauraient régir ? » (Jean de Rotrou, Venceslas (1647), I, 1, vers 29-50 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1008).
. Ladislas : « Ne nous obstinons point à des vœux superflus ; / Laissons mourir l'amour où l'espoir ne vit plus. » (Jean de Rotrou, Venceslas (1647), II, 2, vers 577-578 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1026).
. Alexandre : « L'ami qui souffre seul fait une injure à l'autre ; / Ma part de votre ennui diminuera la vôtre. » (Jean de Rotrou, Venceslas (1647), III, 2, vers 815-816 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1034).
. Cassandre : « D’assassin de son frère il peut être le vôtre ; / Un crime pourrait bien être un essai de l’autre : / Ainsi que les vertus, les crimes enchaînés / Sont toujours ou souvent l'un par l'autre traînés. » (Jean de Rotrou, Venceslas (1647), IV, 6, vers 1399-1403 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1055).
. Palmyras : « Quand on peut prévenir c'est faiblesse d'attendre. » (Jean de Rotrou, Cosroès (1648), I, 3, vers 250 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome I, 1975, p. 1083).
SAVINIEN CYRANO de BERGERAC (1619-1655)
. Sejanus : « Et puis mourir n’est rien, c’est achever de naître ; / Un esclave hier mourut pour divertir son maître : / Aux malheurs de la vie on n’est point enchaîné, / Et l’âme est dans la main du plus infortuné. » (Cyrano de Bergerac, La Mort d’Agrippine (1654), II, 4, vers 609-612 ; Œuvres complètes, éd. Belin, 1977, p. 266).
. Terentius : « Ces Dieux renverseront tout ce que tu proposes. » — Sejanus : « Un peu d’encens brûlé rajuste bien des choses. » — Terentius : « Qui les craint, ne craint rien. » — Sejanus : « Ces enfants de l’effroi, / Ces beaux riens qu’on adore, et sans savoir pourquoi, / Ces altérés du sang des bêtes qu’on assomme, / Ces dieux que l’homme a faits, et qui n’ont point fait l’homme, / Des plus fermes États ce fantasque soutien, / Va, va, Terentius, qui les craint, ne craint rien. » — Terentius : « Mais s’il n’en était point, cette machine ronde… ? » — Sejanus : « Oui, mais s’il en était, serais-je encore au monde ? » (Cyrano de Bergerac, La Mort d’Agrippine (1654), II, 4, vers 633-642 ; Œuvres complètes, éd. Belin, 1977, p. 266-267).
. Agrippine : « D’un si triste spectacle es-tu donc à l’épreuve ? » — Sejanus : « Cela n’est que la mort, et n’a rien qui m’émeuve. » — Agrippine : « Et cette incertitude où mène le trépas ? » — Sejanus : « Étais-je malheureux, lorsque je n’étais pas ? / Une heure après la mort notre âme évanouie / Sera ce qu’elle était une heure avant la vie. » (Cyrano de Bergerac, La Mort d’Agrippine (1654), V, 6, vers 1557-1562 ; Œuvres complètes, éd. Belin, 1977, p. 294-295).
. Horace : « L’allégresse du cœur s’augmente à la répandre ; / Et goûtât-on cent fois un bonheur tout parfait, / On n’en est pas content, si quelqu’un ne le sait. » (Molière, L’École des femmes (1662), IV, 6, vers 1177-1179 ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 600).
. Arnolphe : « Chose étrange d’aimer, et que pour ces traîtresses / Les hommes soient sujets à de telles faiblesses ! / Tout le monde connaît leur imperfection : / Ce n’est qu’extravagance et qu’indiscrétion ; / Leur esprit est méchant, et leur âme fragile ; / Il n’est rien de plus faible et de plus imbécile, / Rien de plus infidèle : et malgré tout cela, / Dans le monde on fait tout pour ces animaux-là. » (Molière, L’École des femmes (1662), V, 4, vers 1572-1579 ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 616).
. Uranie : « Je goûte ceux qui sont raisonnables, et me divertis des extravagants. » (Molière, La Critique de l’École des femmes (1663), scène I ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 644).
. Uranie : « Il veut être le premier de son opinion, et qu’on attende par respect son jugement. Toute approbation qui marche avant la sienne est un attentat sur ses lumières, dont il se venge hautement en prenant le contraire parti. » (Molière, La Critique de l’École des femmes (1663), scène V ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 655).
. Dorante : « C’est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens. » (Molière, La Critique de l’École des femmes (1663), scène VI ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 661).
. Molière : « Il n’y en a point qu’on ne pût attraper par quelque endroit, si je les avais bien étudiés. » (Molière, L’Impromptu de Versailles (1663), scène I ; Pléiade Couton tome I, 1971, p. 681).
. Elvire : « Le même Ciel dont tu te joues me saura venger de ta perfidie. » — Don Juan : « Sganarelle, le Ciel ! » — Sganarelle : « Vraiment oui, nous nous moquons bien de cela, nous autres. » (Molière, Dom Juan ou le festin de pierre (1665), I, 3 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 41).
. Sganarelle : « Qu’est-ce donc que vous croyez ? » — Don Juan : « Ce que je crois ? » — Sganarelle : « Oui. » — Don Juan : « Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit. » (Molière, Dom Juan ou le festin de pierre (1665), III, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 57).
. Sganarelle : « Il faut avouer qu’il se met d’étranges folies dans la tête des hommes, et que pour avoir bien étudié on en est bien moins sage le plus souvent. » (Molière, Dom Juan ou le festin de pierre (1665), III, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 57).
. Don Juan : « Non, non, rien n’est capable de m’imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c’est un corps ou un esprit. » (Molière, Dom Juan ou le festin de pierre (1665), V, 5 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 85).
. Sganarelle : « Je n’étais pas fort satisfait de sa conduite, et nous avions le plus souvent dispute ensemble ; mais enfin la mort rajuste toutes choses. Elle est morte : je la pleure. Si elle était en vie, nous nous querellerions. » (Molière, L’Amour médecin (1665), I, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 98).
. Lisette : « Je ne sais si cela se peut ; mais je sais bien que cela est. » (Molière, L’Amour médecin (1665), II, 2 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 106).
. M. Tomès : « Un homme mort n’est qu’un homme mort, et ne fait point de conséquence ; mais une formalité négligée porte un notable préjudice à tout le corps des médecins. » (Molière, L’Amour médecin (1665), II, 3 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 107).
. M. Filerin : « N’est-ce pas assez que les savants voient les contrariétés et les dissensions qui sont entre nos auteurs et nos anciens maîtres, sans découvrir encore au peuple, par nos débats et nos querelles, la forfanterie de notre art ? […] Toutes ces contestations nous ont décriés, depuis peu, d’une étrange manière, et, si nous n’y prenons garde, nous allons nous ruiner nous-mêmes. […] Puisque le Ciel nous fait la grâce que, depuis tant de siècles, on demeure infatué de nous, ne désabusons point les hommes avec nos cabales extravagantes, et profitons de leur sottise le plus doucement que nous pourrons. Nous ne sommes pas les seuls, comme vous savez, qui tâchons à nous prévaloir de la faiblesse humaine. C’est là que va l’étude de la plupart du monde, et chacun s’efforce de prendre les hommes par leur faible, pour en tirer quelque profit. Les flatteurs, par exemple, cherchent à profiter de l’amour que les hommes ont pour les louanges, en leur donnant tout le vain encens qu’ils souhaitent : et c’est un art où l’on fait, comme on voit, des fortunes considérables. Les alchimistes tâchent à profiter de la passion qu’on a pour les richesses, en promettant des montagnes d’or à ceux qui les écoutent ; et les diseurs d’horoscopes, par leurs prédictions trompeuses, profitent de la vanité et de l’ambition des crédules esprits. Mais le plus grand faible des hommes, c’est l’amour qu’ils ont pour la vie ; et nous en profitons, nous autres, par notre pompeux galimatias, et savons prendre nos avantages de cette vénération, que la peur de mourir leur donne pour notre métier. […] N’allons point, dis-je, détruire sottement les heureuses préventions d’une erreur qui donne du pain à tant de personnes. » (Molière, L’Amour médecin (1665), III, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 112-113).
. Alceste : « Non, je ne puis souffrir cette lâche méthode / Qu’affectent la plupart de vos gens à la mode ; / Et je ne hais rien tant que les contorsions / De tous ces grands faiseurs de protestations, / Ces affables donneurs d’embrassades frivoles, / Ces obligeants diseurs d’inutiles paroles, / Qui de civilités avec tous font combat, / Et traitent du même air l’honnête homme et le fat. / Quel avantage a-t-on qu’un homme vous caresse, / Vous jure amitié, foi, zèle, estime, tendresse, / Et vous fasse de vous un éloge éclatant, / Lorsque au premier faquin il court en faire autant ? / Non, non, il n’est point d’âme un peu bien située / Qui veuille d’une estime ainsi, prostituée ; / Et la plus glorieuse a des régals peu chers, / Dès qu’on voit qu’on nous mêle avec tout l’univers : / Sur quelque préférence une estime se fonde, / Et c’est n’estimer rien qu’estimer tout le monde. / Puisque vous y donnez, dans ces vices du temps, / Morbleu ! vous n’êtes pas pour être de mes gens ; / Je refuse d’un cœur la vaste complaisance / Qui ne fait de mérite aucune différence ; / Je veux qu’on me distingue ; et pour le trancher net, / L’ami du genre humain n’est point du tout mon fait. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 41-64 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 143-144).
. Alceste : « Mes yeux sont trop blessés ; et la cour et la ville / Ne m’offrent rien qu’objets à m’échauffer la bile : / J’entre en une humeur noire, en un chagrin profond, / Quand je vois vivre entre eux les hommes comme ils font ; / Je ne trouve partout que lâche flatterie, / Qu’injustice, intérêt, trahison, fourberie ; / Je n’y puis plus tenir, j’enrage, et mon dessein / Est de rompre en visière à tout le genre humain. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 89-96 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 145).
. Alceste : « Tous les hommes me sont à tel point odieux, / Que je serais fâché d’être sage à leurs yeux. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 111-112 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 146).
. Alceste : « Non : elle [=cette aversion] est générale, et je hais tous les hommes : / Les uns, parce qu’ils sont méchants et malfaisants, / Et les autres, pour être aux méchants complaisants, / Et n’avoir pas pour eux ces haines vigoureuses / Que doit donner le vice aux âmes vertueuses. / […] Têtebleu ! ce me sont de mortelles blessures, / De voir qu’avec le vice on garde des mesures ; / Et parfois il me prend des mouvements soudains / De fuir dans un désert l’approche des humains. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 118-122 et 141-144 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 146-147).
. Philinte : « Mon Dieu, des mœurs du temps mettons-nous moins en peine, / Et faisons un peu grâce à la nature humaine ; / Ne l’examinons point dans la grande rigueur, / Et voyons ses défauts avec quelque douceur. / Il faut, parmi le monde, une vertu traitable ; / À force de sagesse, on peut être blâmable ; / La parfaite raison fuit toute extrémité, / Et veut que l’on soit sage avec sobriété. / Cette grande raideur des vertus des vieux âges / Heurte trop notre siècle et les communs usages ; / Elle veut aux mortels trop de perfection : / Il faut fléchir au temps sans obstination ; / Et c’est une folie à nulle autre seconde / De vouloir se mêler de corriger le monde. / J’observe, comme vous, cent choses tous les jours, / Qui pourraient mieux aller, prenant un autre cours ; / Mais quoi qu’à chaque pas je puisse voir paraître, / En courroux, comme vous, on ne me voit point être ; / Je prends tout doucement les hommes comme ils sont, / J’accoutume mon âme à souffrir ce qu’ils font ; / Et je crois qu’à la cour, de même qu’à la ville, / Mon flegme est philosophe autant que votre bile. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 145-166 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 147).
. Philinte : « Oui, je vois ces défauts, dont votre âme murmure, / Comme vices unis à l’humaine nature ; / Et mon esprit enfin n’est pas plus offensé / De voir un homme fourbe, injuste, intéressé, / Que de voir des vautours affamés de carnage, / Des singes malfaisants, et des loups pleins de rage. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 173-178 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 148).
. Alceste : « J’aurai le plaisir de perdre mon procès. » — Philinte : « Mais enfin… » — Alceste : « Je verrai, dans cette plaiderie, / Si les hommes auront assez d’effronterie, / Seront assez méchants, scélérats et pervers, / Pour me faire injustice aux yeux de l’univers. » — Philinte : « Quel homme ! » — Alceste : « Je voudrais, m’en coutât-il grand-chose, / Pour la beauté du fait avoir perdu ma cause. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 1, vers 196-202 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 149-150).
. Alceste : « Quel besoin si pressant avez-vous de rimer ? / Et qui diantre vous pousse à vous faire imprimer ? / Si l’on peut pardonner l’essor d’un mauvais livre, / Ce n’est qu’aux malheureux qui composent pour vivre. / Croyez-moi, résistez à vos tentations, / Dérobez au public ces occupations. » (Molière, Le Misanthrope (1666), I, 2, vers 363-368 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 157).
. Alceste : « Plus on aime quelqu’un, moins il faut qu’on le flatte ; / À ne rien pardonner le pur amour éclate ; / Et je bannirais, moi, tous ces lâches amants / Que je verrais soumis à tous mes sentiments, / Et dont, à tous propos, les molles complaisances / Donneraient de l’encens à mes extravagances. » (Molière, Le Misanthrope (1666), II, 4, vers 701-706 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 173-174).
. Alceste : « Mais ne présumez pas que, sans être vengé, / Je souffre le dépit de me voir outragé. » (Molière, Le Misanthrope (1666), IV, 3, vers 1295-1296 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 197).
. Alceste : « Trop de perversité règne au siècle où nous sommes, / Et je veux me tirer du commerce des hommes. / […] Allons, c’est trop souffrir les chagrins qu’on nous forge : / Tirons-nous de ce bois et de ce coupe-gorge. / Puisque entre humains ainsi vous vivez en vrais loups, / Traîtres, vous ne m’aurez de ma vie avec vous. » (Molière, Le Misanthrope (1666), V, 1, vers 1485-1486 et 1521-1524 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 205-206).
. Sganarelle : « Ô la grande fatigue que d’avoir une femme ! et qu’Aristote a bien raison, quand il dit qu’une femme est pire qu’un démon ! »[3] (Molière, Le Médecin malgré lui (1666), I, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 225).
. Valère : « C’est une chose admirable, que tous les grands hommes ont toujours du caprice, quelque petit grain de folie mêlé à leur science. »[4] (Molière, Le Médecin malgré lui (1666), I, 4 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 231).
. Mercure : « Lorsque dans un haut rang on a l’heur de paraître, / Tout ce qu’on fait est toujours bel et bon ; / Et suivant ce qu’on peut être, / Les choses changent de nom. » (Molière, Amphitryon (1668), prologue, vers 128-131 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 365).
. Premier médecin : « Mauvais signe, lorsqu’un malade ne sent pas son mal. » (Molière, Monsieur de Pourceaugnac (1669), I, 8 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 611).
. Maître à danser : « L’intérêt est quelque chose de si bas qu’il ne faut jamais qu’un honnête homme montre pour lui de l’attachement. » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme (1670), I, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 713).
. Monsieur Jourdain : « Il n’y a morale qui tienne, je me veux mettre en colère tout mon soûl, quand il m’en prend envie. » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme (1670), II, 4 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 727).
. Monsieur Jourdain : « O, O, O. Vous avez raison. O. Ah ! la belle chose, que de savoir quelque chose ! […] U, U. Il n’y a rien de plus véritable : U. […] U, U. Cela est vrai. Ah ! que n’ai-je étudié plus tôt, pour savoir tout cela ? » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme (1670), II, 4 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 728-729).
. Dorimène : « Il faut des deux parts bien des qualités pour vivre heureusement ensemble ; et les deux plus raisonnables personnes du monde ont souvent peine à composer une union dont ils soient satisfaits. » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme (1670), III, 15 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 758).
. Scapin : « Que voulez-vous ? il y a été poussé par sa destinée. » — Argante : « Ah ! ah ! voici une raison la plus belle du monde. On n’a plus qu’à commettre tous les crimes imaginables, tromper, voler, assassiner, et dire pour excuse qu’on y a été poussé par sa destinée. » (Molière, Les Fourberies de Scapin (1671), I, 4 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 907).
. Scapin : « La tranquillité en amour est un calme désagréable ; un bonheur tout uni nous devient ennuyeux ; il faut du haut et du bas dans la vie ; et les difficultés qui se mêlent aux choses réveillent les ardeurs, augmentent les plaisirs. » (Molière, Les Fourberies de Scapin (1671), III, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 931).
. Silvestre : « Pourquoi, de gaieté de cœur, veux-tu chercher à t’attirer de méchantes affaires ? » — Scapin : « Je me plais à tenter des entreprises hasardeuses. » — Silvestre : « Je te l’ai déjà dit, tu quitterais le dessein que tu as, si tu m’en voulais croire. » — Scapin : « Oui, mais c’est moi que j’en croirai. » (Molière, Les Fourberies de Scapin (1671), III, 1 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 932).
. Philaminte : « Mon cœur n’est point du tout ébranlé de ce coup. / Faites, faites paraître une âme moins commune, / À braver, comme moi, les traits de la fortune. / […] Ah ! quel honteux transport ! Fi ! tout cela n’est rien. / Il n’est pour le vrai sage aucun revers funeste, / Et perdant toute chose, à soi-même il se reste. » (Molière, Les Femmes savantes (1672), V, 4, vers 1696-1698 et 1706-1708 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 1069).
. Argan : « Nous voyons que, dans la maladie, tout le monde a recours aux médecins. » — Béralde : « C’est une marque de la faiblesse humaine, et non pas de la vérité de leur art. » (Molière, Le Malade imaginaire (1673), III, 3 ; Pléiade Couton tome II, 1971, p. 1153).
. Pirithoüs : « Voir un ingrat qu'on aime, et le voir inflexible, / C'est de tous les ennuis l'ennui le plus sensible. » (Thomas Corneille, Ariane (1672), III, 2, vers 887-888 ; Pléiade Théâtre du XVIIe siècle, tome II, 1986, p. 935).
. Le Comte : « Le crime fait la honte et non pas l'échafaud. » (Thomas Corneille, Le Comte d'Essex (1678), IV, 3 ; éd. Thomas Amaury, Lyon, 1678, p. 57).
. Je plains fort le malheur d’un homme qui travaille pour le public. […] Il n’y a rien […] de plus injuste qu’un ignorant. Il croit toujours que l’admiration est le partage des gens qui ne savent rien. (Racine, Britannicus, préface ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 375).
. Taxile : « Rendons-lui des devoirs qui ne nous coûtent rien. » — Porus : « Qui ne nous coûtent rien, Seigneur ! L’osez-vous croire ? / Compterai-je pour rien la perte de ma gloire ? » (Racine, Alexandre le Grand (1665), I, 2, vers 196-198 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 135).
. Cléofile : « Des captifs comme lui brisent bientôt leur chaîne : / À de plus hauts desseins la gloire les entraîne ; / Et l’amour dans leurs cœurs, interrompu, troublé, / Sous le faix des lauriers est bientôt accablé. » (Racine, Alexandre le Grand (1665), II, 1, vers 365-368 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 141).
. Porus : « Ennemis du repos qui perdit ces infâmes, / L’or qui naît sous nos pas ne corrompt point nos âmes. / La gloire est le seul bien qui nous puisse tenter, / Et le seul que mon cœur cherche à lui disputer. » [5] (Racine, Alexandre le Grand (1665), II, 2, vers 581-584 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 146-147).
. Axiane : « Mais sur la seule foi d’un amour qui vous flatte, / Peut-être avant le temps ce grand orgueil éclate : / Vous poussez un peu loin vos vœux précipités, / Et vous croyez trop tôt ce que vous souhaitez. » (Racine, Alexandre le Grand (1665), III, 1, vers 725-728 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 153).
. Alexandre : « J’avoûrai qu’autrefois, au milieu d’une armée, / Mon cœur ne soupirait que pour la renommée ; / Les peuples et les rois, devenus mes sujets, / Étaient seuls à mes vœux d’assez dignes objets. / Les beautés de la Perse à mes yeux présentées, / Aussi bien que ses rois ont paru surmontées. / Mon cœur, d’un fier mépris armé contre leurs traits, / N’a pas du moindre hommage honoré leurs attraits ; / Amoureux de la gloire, et partout invincible, / Il mettait son bonheur à paraître insensible. » (Racine, Alexandre le Grand (1665), III, 6, vers 885-894 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 158).
. Taxile : « Il faut que tout périsse, ou que je sois heureux. » (Racine, Alexandre le Grand (1665), IV, 4, vers 1244 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 169).
. Hermione : « Lui qui me fut si cher, et qui m’a pu trahir, / Ah ! je l’ai trop aimé pour ne le point haïr. » (Racine, Andromaque (1667), II, 1, vers 415-416 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 212).
. Oreste : « Mais s’il faut ne te rien déguiser, / Mon innocence enfin commence à me peser. / Je ne sais de tout temps quelle injuste puissance / Laisse le crime en paix et poursuit l’innocence. / De quelque part sur moi que je tourne les yeux, / Je ne vois que malheurs qui condamnent les Dieux. / Méritons leur courroux, justifions leur haine, / Et que le fruit du crime en précède la peine. » (Racine, Andromaque (1667), III, 1, vers 771-778 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 225).
. Pylade : « Au travers des périls un grand cœur se fait jour. / Que ne peut l’amitié conduite par l’amour ? » (Racine, Andromaque (1667), III, 1, vers 787-788 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 225).
. Cléone : « La douleur qui se tait n’en est que plus funeste. » (Racine, Andromaque (1667), III, 3, vers 834 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 227).
. Hermione : « Ma vengeance est perdue / S’il ignore en mourant que c’est moi qui le tue. » (Racine, Andromaque (1667), IV, 4, vers 1269-1270 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 243).
. Pyrrhus : « Il faut se croire aimé pour se croire infidèle. » (Racine, Andromaque (1667), IV, 5, vers 1350 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 245).
. Isabelle : « Hé ! Monsieur, peut-on voir souffrir des malheureux ? » — Dandin : « Bon, cela fait toujours passer une heure ou deux. » (Racine, Les Plaideurs (1668), III, 4, vers 851-852 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 362).
. Agrippine : « Je le craindrais bientôt, s’il ne me craignait plus. » (Racine, Britannicus (1669), I, 1 ; vers 74 ; Pléiade G. Forestier, 1999 p. 379).
. Burrhus : « Croyez-moi, quelque amour qui semble vous charmer, / On n’aime point, Seigneur, si l’on ne veut aimer. » (Racine, Britannicus (1669), III, 1 ; vers 789-790 ; Pléiade G. Forestier, 1999 p. 403).
. Titus : « Mais il ne s’agit plus de vivre, il faut régner ». (Racine, Bérénice (1670), IV, 5, vers 1102 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 493).
. Atalide : « Mais qu’aisément l’amour croit tout ce qu’il souhaite ! » (Racine, Bajazet (1671), I, 4, vers 373 ; Pléiade G. Forestier 1999, p. 572).
. Bajazet : « Je me plains de mon sort moins que vous ne pensez. / La mort n’est point pour moi le comble des disgrâces. » (Racine, Bajazet (1671), II, 3, vers 608-609 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 580).
. Acomat : « Mais il m’est désormais trop dur de reculer. / Par une belle chute il faut me signaler. » (Racine, Bajazet (1671), IV, 7, vers 1399-1400 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 608).
. Pharnace : « Surtout j’admire en vous ce cœur infatigable / Qui semble s’affermir sous le faix qui l’accable. » (Racine, Mithridate (1672), III, 1, vers 867-868 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 658).
. Mithridate : « L’amour avidement croit tout ce qui le flatte. » (Racine, Mithridate (1672), III, 4, vers 1027 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 663).
. Achille : « Je puis choisir, dit-on, ou beaucoup d'ans sans gloire, / Ou peu de jours suivis d'une longue mémoire. / Mais puisqu'il faut enfin que j'arrive au tombeau, / Voudrais-je, de la terre inutile fardeau, / Trop avare d'un sang reçu d'une déesse, / Attendre chez mon père une obscure vieillesse, / Et toujours de la gloire évitant le sentier, / Ne laisser aucun nom, et mourir tout entier ? / Ah ! ne nous formons point ces indignes obstacles ; / L'honneur parle, il suffit : ce sont là nos oracles. / Les dieux sont de nos jours les maîtres souverains ; / Mais, Seigneur, notre gloire est dans nos propres mains. / Pourquoi nous tourmenter de leurs ordres suprêmes ? / Ne songeons qu'à nous rendre immortels comme eux-mêmes, / Et laissant faire au sort, courons où la valeur / Nous promet un destin aussi grand que le leur. / C'est à Troie, et j'y cours ; et quoi qu'on me prédise, / Je ne demande aux dieux qu'un vent qui m'y conduise. » (Racine, Iphigénie (1674), I, 2, vers 249-266 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 710).
. Phèdre : « Mourons. De tant d’horreurs qu’un trépas me délivre. / Est-ce un malheur si grand que de cesser de vivre ? / La mort aux malheureux ne cause point d’effroi. / Je ne crains que le nom que je laisse après moi. » (Racine, Phèdre (1677), III, 3, vers 857-960 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 850).
. Mardochée : « Quoi ! lorsque vous voyez périr votre patrie, / Pour quelque chose, Esther, vous comptez votre vie ! / Dieu parle, et d’un mortel vous craignez le courroux ! / Que dis-je ? Votre vie, Esther, est-elle à vous ? / N’est-elle pas au sang dont vous êtes issue ? / N’est-elle pas à Dieu dont vous l’avez reçue ? » (Racine, Esther (1689), I, 3, vers 205-210 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 959).
. Athalie : « Ce que j’ai fait, Abner, j’ai cru le devoir faire. / Je ne prends point pour juge un peuple téméraire. » (Racine, Athalie (1690), II, 5, vers 467-468 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 1033).
. Mathan : « Dans le vulgaire obscur si le sort l’a placé, / Qu’importe qu’au hasard un sang vil soit versé ? / Est-ce aux rois à garder cette lente justice ? / Leur sûreté souvent dépend d’un prompt supplice. / N’allons point les gêner d’un soin embarrassant. / Dès qu’on leur est suspect, on n’est plus innocent. » (Racine, Athalie (1690), II, 5, vers 565-570 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 1036).
. Mathan : « Elle flotte, elle hésite, en un mot elle est femme. » (Racine, Athalie (1690), III, 3, vers 876 ; Pléiade G. Forestier, 1999, p. 1049).
PROSPER JOLYOT DE CRÉBILLON père (1674-1762)
. Tydée : « Que ne peut la valeur où le cœur s'intéresse ? » (Prosper Jolyot de Crébillon, Électre (1708), II, 1 ; Œuvres, tome I, chez Lefèvre et Aimé-André, 1828, p. 253).
. Artaban : « Un cœur comme le mien est au-dessus des lois : / La crainte fit les dieux, l’audace a fait les rois. » (Prosper Jolyot de Crébillon, Xerxès (1714), I, 1 ; Œuvres, tome II, chez Lefèvre et Aimé-André, 1828, p. 9).
. Catilina : « Le succès fut toujours un enfant de l’audace. / L’homme prudent voit trop, l’illusion le suit ; / L’intrépide voit mieux, et le fantôme fuit : / L’instant le plus terrible éclaire son courage, / Et le plus téméraire est alors le plus sage. / L'imprudence n'est pas dans la témérité, / Elle est dans un projet faux et mal concerté. / Mais s’il est bien suivi, c’est un trait de prudence / Que d’aller quelquefois jusques à l’insolence ; / Et je sais, pour dompter les plus impérieux, / Qu’il faut souvent moins d’art que de mépris pour eux. » (Prosper Jolyot de Crébillon, Catilina (1748), III, 4 ; Œuvres, tome II, chez Lefèvre et Aimé-André, 1828, p. 300-301).
. Catilina : « Que craignez-vous ? Ma mort ? La mort n'est qu'un instant / Que le grand cœur défie, et que le lâche attend. » (Prosper Jolyot de Crébillon, Catilina (1748), V, 6 ; Œuvres, tome II, chez Lefèvre et Aimé-André, 1828, p. 333).
. Philinte : « La critique est aisée, et l’art est difficile. » [6] (Destouches, Le Glorieux (1732), II, 5, vers 689 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 605).
. Lisette : « Quand on fait trop le grand, on paraît bien petit » (Destouches, Le Glorieux (1732), III, 5, vers 1218 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 635).
. Lisette : « Je ne vous dirai pas : changez de caractère ; / Car on n’en change point, je ne le sais que trop. / Chassez le naturel, il revient au galop ; [7] / Mais du moins je vous dis : songez à vous contraindre, / Et devant Isabelle efforcez-vous de feindre. » (Destouches, Le Glorieux (1732), III, 5, vers 1228-1232 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 635).
. Jocaste : « Nos prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense ; / Notre crédulité fait toute leur science ». (Voltaire, Œdipe (1718), IV, 1, vers 951-952 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 428).
. Titus : « Mon devoir est le maître ; / Non, crois-moi, l'homme est libre au moment qu'il veut l'être. / Je l’avoue, il est vrai, ce dangereux poison / A pour quelques moments égaré ma raison ; / Mais le cœur d’un soldat sait dompter la mollesse, / Et l’amour n’est puissant que par notre faiblesse. » (Voltaire, Brutus (1730), II, 1 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 145).
. Brutus : « Mais quand nous connaîtrons le nom des parricides, / Prenez garde, Romains, point de grâce aux perfides ! / Fussent-ils nos amis, nos frères, nos enfants, / Ne voyez que leur crime, et gardez vos serments. / Rome, la liberté demandent leur supplice ; / Et qui pardonne au crime en devient le complice. » (Voltaire, Brutus (1730), IV, 1 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 153).
. Mérope : « Quand on a tout perdu, quand on n’a plus d’espoir, / La vie est un opprobre, et la mort un devoir. » (Voltaire, Mérope (1743), II, 7, vers 599-600 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 835).
. Oreste : « Marchons ; notre péril doit nous déterminer : / Qui ne craint point la mort est sûr de la donner. » (Voltaire, Oreste (1750), III, 8 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 472).
. César : « Un jugement trop prompt est souvent sans justice. » (Voltaire, Rome sauvée ou Catilina (1750), IV, 4 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 497).
. Cicéron : « Le devoir le plus saint, la loi la plus chérie, / Est d'oublier la loi pour sauver la patrie. » (Voltaire, Rome sauvée ou Catilina (1750), IV, 4 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 498).
. Aménaïde : « C’est le sort d’un héros d’être persécuté » (Voltaire, Tancrède (1760), I, 6 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 547).
. Tancrède : « À tous les cœurs bien nés que la patrie est chère ! » (Voltaire, Tancrède (1760), III, 1 ; Œuvres complètes, éd. É. de La Bédollière et G. Avenel, Le Siècle, 1868, tome III, p. 550).
JEAN-BAPTISTE-LOUIS GRESSET (1709-1777)
. Cléon : « Quand je n'y trouverais que de quoi m'amuser, / Oh ! c'est le droit des gens, et je veux en user. / Tout languit, tout est mort, sans la tracasserie ; / C'est le ressort du monde et l'âme de la vie : / Bien fou qui là-dessus contraindrait ses désirs ; / Les sots sont ici-bas pour nos menus plaisirs. » (Gresset, Le Méchant (1747), II, 1, vers 507-512 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 1224).
. Valère : « On ne vit qu'à Paris, et l'on végète ailleurs. » (Gresset, Le Méchant (1747), III, 9, vers 1408 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 1260).
. Cléon : « Au reste, chacun parle et fait comme il l’entend ; / Tout est mal, tout est bien, tout le monde est content. » (Gresset, Le Méchant (1747), IV, 7, vers 1983-1984 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 1284).
. Ariste : « L'esprit qu'on veut avoir gâte celui qu'on a. » (Gresset, Le Méchant (1747), IV, 7, vers 2000 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome I, 1972, p. 1284).
. Désir de fille est un feu qui dévore / Désir de nonne est cent fois pis encore. (Gresset, Ver-vert ou les voyages du perroquet de Nevers, chant II, 6e éd., 1736, p. 13).
PIERRE-LAURENT DE BELLOY (1727-1775)
. Saint-Pierre : « Malheur aux nations qui, cédant à l’orage, / Laissent par les revers avilir leur courage, / N’osent braver le sort qui vient les opprimer, / Et pour dernier affront cessent de s’estimer ! » (P.-L. de Belloy, Le Siège de Calais (1765), I, 1, vers 31-34 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 456).
. Harcourt : « Ah ! de ses fils absents, la France est plus chérie : / Plus je vis d’étrangers, plus j’aimais ma patrie. » (P.-L. de Belloy, Le Siège de Calais (1765), II, 3, vers 459-460 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 470).
. Amblétuse : « Eh bien ! le désespoir éclaire mon courage. / Pourquoi tourner sur nous notre inutile rage ? / En courant à la mort d'un visage affermi, / Que ne la portons-nous au sein de l'ennemi ? / Ce n'est point à mourir que la gloire convie, / C'est à rendre sa mort utile à sa patrie. / Un aveugle courage est-il une vertu ? / Qui ne sait que mourir ne sait qu'être vaincu. / Qu'aux tentes des Anglais la fureur nous entraîne. / Allons ensanglanter leur victoire inhumaine ; / De notre perte encor forçons-les à gémir ; / Si l'on ne peut les vaincre, il faut les affaiblir. / Sous leur nombre accablant si la valeur succombe, / Elle peut entraîner ses vainqueurs dans sa tombe ; / Expirons dans leur sang ; et que notre pays, / En perdant ses vengeurs, compte moins d’ennemis. » (P.-L. de Belloy, Le Siège de Calais (1765), II, 5, vers 603-618 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 475).
. Mauni : « Je hais ces cœurs glacés et morts pour leur pays, / Qui, voyant ses malheurs dans une paix profonde, / S’honorent du grand nom de citoyens du monde, / Feignent dans tout climat d’aimer l’humanité / Pour ne la point servir dans leur propre cité ; / Fils ingrats, vils fardeaux du sein qui les fit naître, / Et dignes du néant, par l’oubli de leur être. » (P.-L. de Belloy, Le Siège de Calais (1765), IV, 2, vers 1146-1152 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 494).
JEAN-FRANÇOIS DUCIS (1733-1816)
. Il est des jours d'ennui, d'abattement extrême, / Où l'homme le plus ferme est à charge à lui-même. (Jean-François Ducis, Macbeth (1784), III, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 124).
MARIE-JOSEPH CHÉNIER (1764-1811)
. Catherine : « Le chef de l'État / Ne doit pas affecter les vertus d'un soldat. / Il est d'autres honneurs, il est une autre gloire, / Et l'art de gouverner vaut mieux qu'une victoire. » (Marie-Joseph Chénier, Charles IX ou la Saint-Barthélemy (1789), II, 1, vers 355-358 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 1038).
. Coligny : « Et ces temps ne sont plus où l'Europe avilie / Craignait les vains décrets du prêtre d'Italie. » (Marie-Joseph Chénier, Charles IX ou la Saint-Barthélemy (1789), II, 3, vers 561-562 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 1044).
. Lorraine : « Ce projet trouverait un obstacle invincible : / On n'exécute rien quand on veut l'impossible. » (Marie-Joseph Chénier, Charles IX ou la Saint-Barthélemy (1789), III, 1, vers 767-768 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 1052).
. L'Hôpital : « La vertu des humains n’est point dans leur croyance ; / Elle est dans la justice, et dans la bienfaisance. / De quel droit des mortels, parlant au nom des cieux, / Nous imposeraient-ils un joug religieux ? » (Marie-Joseph Chénier, Charles IX ou la Saint-Barthélemy (1789), III, 1, vers 783-786 ; Pléiade Théâtre du XVIIIe siècle, tome II, 1974, p. 1052).
. La Salle : « Un peuple affamé de carnage / Veut rendre un Dieu clément complice de sa rage. » (Marie-Joseph Chénier, Jean Calas ou l’école des juges (1791), I, 1, vers 3-4 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 413).
. Mme Calas : « Vous le savez : Un cœur qui n’a jamais souffert / Aux cris des opprimés est rarement ouvert : / Le faste corrompt l'âme et la rend insensible. » (Marie-Joseph Chénier, Jean Calas ou l’école des juges (1791), V, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 430).
. Cornélie : « Ce qu'on nomme la vie est un présent funeste ; / Mais la pitié des dieux, parmi tant de fléaux, / Nous donna le sommeil pour soulager nos maux. » (Marie-Joseph Chénier, Caïus Gracchus (1792), I, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 435).
. Gracchus : « Avec la liberté tu veux que je m’exile ! / Quand Rome existe encor, moi chercher un asile ! / Fuir au sein de la nuit, par des chemins secrets, / Comme un brigand chargé du poids de ses forfaits ! / Abandonner ce peuple au sénat qui l’opprime ! / Déserter ma patrie ! y songer est un crime. / Et que penserait-on de l’indigne soldat / Qui fuirait ses drapeaux au moment du combat ? / Non ; l'aspect du péril agrandit le courage ; / Combattre les tyrans fut toujours mon partage. / C’est ici qu’à nos droits ils osent insulter ; / C’est ici qu’est mon poste, et j’y prétends rester ; / Et, quand sous leurs efforts Rome entière chancelle, / Je dois relever Rome, ou tomber avec elle. » (Marie-Joseph Chénier, Caïus Gracchus (1792), III, 5 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 445).
. D'Elmance : « Ah ! déposons le poids de tant d’adversité ! / Le malheur qui n'est plus n'a jamais existé. » (Marie-Joseph Chénier, Fénelon ou les religieuses de Cambrai (1793), V, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 470).
. Fénelon : « Songez qu'au bonheur même il faut s'accoutumer. » (Marie-Joseph Chénier, Fénelon ou les religieuses de Cambrai (1793), V, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 470).
. Anticlès : « Un conjuré qui tremble est bien prêt de périr. » (Marie-Joseph Chénier, Timoléon (1794), I, 2, vers 51 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 474).
. Timoléon : « Le crime est un torrent dont la course est rapide. » (Marie-Joseph Chénier, Timoléon (1794), II, 3 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 479).
. Timoléon : « L'État ne nous doit rien ; / Mais nous lui devons tout : vertus, talents, fortune, / Tout en nous appartient à la mère commune ; / Si nous comptons un jour nul pour la liberté, / Nous lui volons le bien qu'elle nous a prêté. » (Marie-Joseph Chénier, Timoléon (1794), II, 3 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 480).
. Timoléon : « Alors qu'on veut séduire on farde son langage. » (Marie-Joseph Chénier, Timoléon (1794), III, 5 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 487).
. Élisabeth : « Qui n’a pas ses chagrins ? Qui ne répand des larmes ? / Mais un prince à l'État doit souvent s'immoler. » (Marie-Joseph Chénier, Philippe II (1801), II, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 514).
. Cassius : « Pour qui n'est point crédule il n'est point de merveille. » (Marie-Joseph Chénier, Brutus et Cassius ou les derniers Romains (1790), I, 3 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 534).
. Porcie : « Ah ! qu’aux plus noirs chagrins un courage insensible, / Quand il faut l’exercer, est affreux et pénible ! / Et que de la raison les importants avis, / Malgré tous nos efforts, sont lentement suivis ! » (Marie-Joseph Chénier, Brutus et Cassius ou les derniers Romains (1790), III, 4 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 543).
. Saladin : « L'excès de modestie est un excès d'orgueil. » (Marie-Joseph Chénier, Nathan le Sage, II, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 607).
. Saladin : « Un sage avec lenteur doit tout approfondir. » (Marie-Joseph Chénier, Nathan le Sage, II, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 607).
. Nathan : « On peut persécuter, mais non forcer à croire. » (Marie-Joseph Chénier, Nathan le Sage, II, 2 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 609).
. Frère Bonhomme : « Que de gens sont damnés pour avoir eu raison ! » (Marie-Joseph Chénier, Nathan le Sage, III, 4 ; dans Œuvres de J.-F. Ducis et de M.-J. Chénier, Ledentu, 1839, p. 615).
NÉPOMUCÈNE LEMERCIER (1771-1840)
. Aurelle : « La gloire est-elle ce qu'on croit ? / Ce prestige éclatant dont la foule s'abuse / Se doit aux jeux du sort, à la force, à la ruse, / Et non au vain éclat d'un honneur insensé. […] / Le crime et la vertu sont des noms différents / Inventés pour le peuple et non pas pour les grands. / D’innombrables mortels sont justes, mais sans lustre : / Ils mourront inconnus. » (Népomucène Lemercier, Clovis (1801), III, 3 ; Baudouin frères et Barba, 1820, p. 52).
. Astrade : « L'artifice souvent n'est qu'un soin malhabile ; / S'il endort un soupçon, il en éveille mille. » (Népomucène Lemercier, Charlemagne (1816), II, 5 ; Barba, 1816, p. 49).
. Astrade : « Le pouvoir qu'on reçoit a des bornes prescrites ; / Le pouvoir qu'on se fait souvent est sans limites. » (Népomucène Lemercier, Charlemagne (1816), II, 5 ; Barba, 1816, p. 50).
. Astrade : « Le peuple, qu'éblouit la splendeur des monarques, / Du suprême pouvoir révère en eux les marques, / De leur trône élevé l'éclat majestueux / Vient frapper de si haut leur œil respectueux, / Qu'en tremblant il les sert, les contemple et les nomme ; / Faible et crédule, il fait son idole d'un homme. » (Népomucène Lemercier, Charlemagne (1816), II, 5 ; Barba, 1816, p. 51).
. Theudéric : « C'est une trahison que d'excuser un traître. » (Népomucène Lemercier, Charlemagne (1816), III, 1 ; Barba, 1816, p. 62).
. Bourgogne : « Malheur à l'imprudent de qui la confiance / Attend de l'étranger quelque sûre alliance. » (Népomucène Lemercier, La Démence de Charles VI (1820), I, 1, vers 1-2 ; J.-N. Barba, 1820, p. 1).
. Gombaud : « L'innocence des vœux n'en fait pas le succès. » (Népomucène Lemercier, Frédégonde et Brunehaut (1821), I, 5 ; J.-.N. Barba, 1821, p. 15).
[1] Ainsi Poinsinet, dans son Épître à Mlle Corneille, célèbre-t-il Corneille et Voltaire parce qu’ils « donnent des mœurs au peuple et des leçons aux rois » (Journal encyclopédique (V, 1), juillet 1761, p. 123).
[2] Imitation de Sénèque, Lettres à Lucilius, livre I, lettre IV, § 8 (par exemple Bouquins p. 608) : « qui méprise sa vie est maître de la tienne. » (quisquis vitam suam contempsit tuae dominus est.)
[3] Il ne semble pas qu’Aristote ait jamais dit rien de tel. Il en va de cette fausse citation comme de la critique du tabac attribuée à Aristote par un autre Sganarelle dans les toutes premières lignes de Dom Juan.
[4] Idée répandue par le Problème XXX, 1 attribué à Aristote, et citée notamment par Sénèque, De la tranquillité de l’âme, XVII, 10 (Bouquins p. 371) : « Il n’y a eu aucun génie qui ne fût mêlé de folie » (nullum magnum ingenium sine mixtura dementiae fuit).
[5] « Ces infâmes » sont les Persans, dont l’empire a été subjugué par Alexandre avant qu’il s’attaque aux Indes dont Porus est roi. C’est évidemment à Alexandre que le cœur de Porus veut disputer la gloire.
[6] Polybe : « Il nous est facile de critiquer autrui, mais difficile de nous conduire nous-mêmes de façon irréprochable. » (Histoire, XII, 11, 25c ; Pléiade, 1970, p. 725).
[7] Horace vers -20 : « Naturam expelles furca, tamen usque recurret » = Chasse la nature avec une fourche, elle reviendra violemment (Épîtres, I, 10, vers 24). La Fontaine en 1668 : « Ce lui fut toujours une amorce, / Tant le naturel a de force. / Il se moque de tout, certain âge accompli : / Le vase est imbibé, l'étoffe a pris son pli. / En vain de son train ordinaire / On le veut désaccoutumer. / Quelque chose qu'on puisse faire, / On ne saurait le réformer. / Coups de fourche ni d'étrivières / Ne lui font changer de manières ; / Et, fussiez-vous embâtonnés, / Jamais vous n'en serez les maîtres. / Qu'on lui ferme la porte au nez, / Il reviendra par les fenêtres. » («La chatte métamorphosée en femme », Fables, II, 18 ; Pléiade, tome I, 1991, p. 98). Boileau en 1698 : « Le naturel toujours sort et sait se montrer : / Vainement on l’arrête, on le force à rentrer ; / Il rompt tout, perce tout, et trouve enfin passage. » (Satires, XI, vers 43-45 ; Pléiade, 1966, p. 82).
18:37 Écrit par Le déclinologue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robert garnier, corneille, rotrou, venceslas, molière, racine, cyrano de bergerac, thomas corneille, le cid, horace, cinna, polyeucte, le misanthrope, poinsinet, suréna, la mort d'agrippine, alexandre le grand, sénèque, dom juan, l'école des femmes, andromaque, crébillon père, aristote, théâtre classique, tragédie classique, voltaire, marie-joseph chénier, charles ix ou la saint-barthélemy, timoléon, nathan le sage, népomucène lemercier, charlemagne, jean-françois ducis, de belloy, le siège de calais, gresset, brutus, destouches, le glorieux, citations | | | Facebook | | Imprimer | | Digg |