JÉRÔME VALCKE ET L’INEFFICACITÉ DE LA DÉMOCRATIE
26.04.2013
Voici une déclaration trop remarquable pour n'être pas signalée. Notre compatriote Jérôme Valcke, secrétaire général de la FIFA, a déclaré publiquement à Zurich qu'il valait mieux un régime autoritaire qu'une démocratie pour organiser une Coupe du monde. Je reproduis la dépêche de Reuters publiée par 20minutes.fr dans la soirée du 24 avril :
La démocratie peut représenter un obstacle à l'organisation de grands événements sportifs internationaux comme la Coupe du monde de football, a estimé mercredi Jérôme Valcke, secrétaire général de la Fifa.
Le Français a imputé en partie les difficultés d'organisation rencontrées pour le Mondial 2014 au Brésil aux différents échelons administratifs du pays hôte. Jérôme Valcke a ajouté que selon lui, la Russie du Président Vladimir Poutine offrait des conditions a priori plus favorables en vue de la Coupe du monde 2018.
« Je vais dire quelque chose de fou, mais un moindre niveau de démocratie est parfois préférable pour organiser une Coupe du monde », a-t-il dit lors d'une conférence au siège de la Fifa à Zurich. « Quand on a un homme fort à la tête d'un Etat qui peut décider, comme pourra peut-être le faire Poutine en 2018, c'est plus facile pour nous les organisateurs qu'avec un pays comme l'Allemagne où il faut négocier à plusieurs niveaux. » Le dirigeant français a évoqué le cas du Brésil, où « le système politique est divisé en trois niveaux, fédéral, régional et municipal ».
On trouve de pareilles apologies de la dictature dans les Maximes et pensées de Napoléon rassemblées par Balzac, et qui sont sans doute largement dues à ce dernier. Il est vrai que Balzac, à l'instar de la plupart des grands esprits de son temps, n'était nullement partisan de la démocratie, bien au contraire. Voici par exemple la n°11 : « Il est rare qu'une grande assemblée raisonne, elle est trop promptement passionnée » ; la n°79 : « La frontière du gouvernement démocratique est l'anarchie, celle du gouvernement monarchique est le despotisme ; l'anarchie est impuissante, le despotisme peut accomplir de grandes choses » ; la n°186 : « Dans le système du pouvoir absolu il suffit d'une volonté pour détruire un abus, dans le système des assemblées il en faut cinq cents ».
Hélas, un portrait paru l'an dernier dans Le Monde nous apprend que M. Valcke est un personnage un peu louche, tellement à son aise dans ce marigot de corruption qu'est la FIFA qu'on a du mal à l'imaginer aussi immaculé qu'une blanche colombe. Il est dommage que la critique de la démocratie ne soit pas encore propagée par des personnages désintéressés et insoupçonnables. Mais ça finira bien par venir. En outre, celui-ci n'assume pas son téméraire dérapage... à moins qu'il n'adhère même pas aux propos qu'on lui attribue, qu'il a tenu à récuser sur son compte Twitter : « Je regrette que mes propos, tenus hier lors d’un symposium sur la Coupe du Monde, aient pu, sortis de leur contexte, être mal interprétés. / Ceux qui me connaissent savent bien à quel point je suis viscéralement attaché à la démocratie ». Palinodie rapide ou sincère malentendu, M. Valcke n'est donc pas un héritier de Balzac et de Napoléon. Dommage... Il faudra attendre quelqu'un d'autre. Mais il est bon que ce petit caillou ait été lancé dans le jardin du droidlomisme. Toute dépêche remettant en cause la pensée unique pro-démocratique ne peut être que bonne à prendre, et à diffuser.
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